7 techniques de développement sur Lightroom pour gagner du temps
Lightroom est un outil puissant de développement de vos photos. Je crois avoir utilisé ce logiciel depuis sa première version et n'ai jamais cherché à expérimenter avec des alternatives. Mais vous n'êtes pas là pour que je vous parle de ma vie, voici 7 techniques que j'ai trouvé indispensables, utiles ou efficaces avec les années de pratiques.
Le profil colorimétrique
Ce réglage est probablement le plus important sur Lightroom si vous photographiez en format RAW, et c'est en même temps celui le moins connu des étudiants de mes formations. Il est normal que je vous le signale en premier :)
Pour faire court, un fichier RAW contient plus d'informations qu'un Jpeg mais lorsqu'il est développé et importé dans votre photothèque il apparaît sans profil colorimétrique. Quand vous regardez votre photo sur l'écran de votre appareil, un profil colorimétrique est utilisé par défaut si vous ne l'avez pas réglé vous-même. C'est ce qui peut expliquer un décalage avec ce que vous avez constaté au moment de la prise de vue.
Par défaut sur Lightroom vous aurez accès aux profils d'Adobe et à ceux de votre appareil qui sont intégrés dans le fichier RAW.
Je vous conseil d'en choisir un en premier dans votre processus de développement, pour obtenir des contrastes et donc des couleurs équilibrées avant de transformer votre photo.
Le module d'exploration de profils colorimétriques se trouve maintenant tout en haut de la colonne de droite du Module de Développement de Lightroom Classic, avant les réglages d'exposition.
Redresser les verticales
Il est normal de ne pas spécialement y faire attention quand on débute en photographie, mais les verticales n'apparaissent pas toujours verticales sur vos photos. C'est aussi vrai pour les horizontales, mais si vous corrigez l'un, vous corrigerez probablement l'autre en même temps.
La raison est simple, la photographie transforme un monde en trois dimensions en un espace en deux dimensions. Si le centre de votre visée ne se trouve pas à l'horizon, vos lignes verticales apparaîtront penchées, et cela peut nuire à votre photographie, par exemple en photographie d'architecture.
Vos compositions vous amèneront souvent à viser "vers le haut" ou "vers le bas", alors pour redresser vos verticales vous avez deux options :
les optiques à décentrement (Tilt-Shift en Anglais)
redresser au développement
Attention en redressant vos perspectives, verticales ou horizontales, vous transformerez votre fichier et devrez probablement recadrer votre photo. À la prise de vue il sera recommandé de cadrer plus large si vous anticipez une telle transformation, ou votre composition risque d'être ruinée par le recadrage.
Le Module sur Lightroom qui permet ces corrections s'appelle "Upright", sur Lightroom Classic il est situé sur la colonne de droite du Module de Développement, entre la correction d'objectifs et les effets. Et pour ma part, deux fois sur trois j'obtiens la correction souhaitée avec un réglage automatique.
Le Filtre Radial
Les outils de correction qui se trouve juste en dessous de l'histogramme de votre photo dans le Module de Développement de Lightroom Classic sont tous utiles, à part peut-être la correction des yeux rouges que je n'ai pas souvenir d'avoir même ouvert.
Parmi ces outils, le filtre radial est certainement le dernier que j'ai considéré. C'est maintenant celui que j'utilise probablement le plus. Pour faire simple vous aurez la possibilité d'appliquer un réglage local, sur une zone circulaire ou ovoïde. Les possibilités d'application sont infinies, voici les 2 cas les plus fréquents me concernant :
Attirer l'attention sur une zone ou un sujet en modifiant légèrement son exposition. C'est comme proposer un léger coup de projecteur, ça peut modifier radicalement la lecture d'une photo.
En portrait, pour sélectionner rapidement la zone du visage et réduire la clarté de la peau.
Notez qu'il est possible d'annuler le réglage du filtre radial en sélectionnant certaines zones avec le pinceau. Vous pouvez être extrêmement précis dans son application.
La zone d'un des deux filtres utilisés sur cette photo
La courbe de tonalité
Pour appliquer du contraste sur une photo, vous aurez 3 principales manières d'utiliser les réglages sur Lightroom Classic :
Le réglage de contraste (DUH). Je l'utilise rarement car le contraste s'appliquera de manière uniforme sur toute votre photo.
Le réglage d'exposition, en baissant la valeur des ombres et augmentant la valeur des hautes lumières. Par défaut mes pré-réglages ont toujours un contraste appliqué de cette manière, avant que je touche à la photo.
La courbe de tonalité. On peut éviter de se compliquer la vie avec la courbe de tonalité, c'est pourtant l'outil le plus fin et précis, notamment pour gérer les contrastes de vos photos. Lightroom est bien fait, il vous proposera par défaut 2 courbes pré-réglées : "Contraste Moyen" et "Contraste Fort".
Tous mes pré-réglages Lightroom que j'utilise au quotidien proposent une courbe de tonalité avec du contraste. Expérimentez avec la courbe de tonalité et trouvez le style qui vous convient le mieux. Enregistrez vos courbes de tonalités préférées pour pouvoir les retrouver ou gagner en cohérence sur une série de photos.
Corriger en dessinant
L'outil de correction de Lightroom est merveilleux. En pratique je vais de moins en moins sur Photoshop, surtout depuis que j'ai découvert que l'on pouvait simplement dessiner avec l'outil de correction.
Je vais être franc avec vous, pendant longtemps quand j'avais une zone à corriger j'augmentais la taille du curseur de correction jusqu'à ce que le cercle en question soit suffisamment grand pour couvrir l'objet à corriger. Oui, je ne corrigeais qu'avec un seul clic... Alors qu'il suffit de réduire la taille du curseur, de continuer à appuyer du le clic gauche du mulot et de dessiner exactement ce que vous voulez corriger.
Et je me dis que je ne suis peut-être pas le seul, alors si je peux faire gagner un peu de temps à quelqu'un...
Si vous vous demandez, voici la photo finale après redressage, correction, recadrage et un pré-réglage :
Guides de recadrage
L'outil de recadrage est un des plus fréquemment utilisés sur Lightroom. J'ai pourtant mis quelques années avant d'apprendre qu l'on pouvait modifier les guides de recadrage avec la touche O lorsque vous êtes dans l'outil recadrage.
J'utilise presque tout le temps le guide de recadrage avec une diagonale et les deux verticales qui rejoignent les deux coins restants. Si je veux inverser le sens, j'appuie simplement sur "Shift O".
Notez que la touche X dans l'outil de recadrage permet de basculer rapidement d'un format horizontal vers un format vertical. Si je peux faire gagner un peu de temps, c'est cadeau.
Rester dans la Bibliothèque
Cette technique est plus un principe d'efficacité. Très souvent, je ne rentre même pas dans le Module de Développement et reste dans la Bibliothèque. J'utilise alors la section de développement rapide du Module Bibliothèque de Lightroom.
Dans le module de Développement Rapide, vous avez également accès à votre liste de pré-réglages depuis la Bibliothèque, ce qui me permet de procéder ainsi quand je veux aller vite :
1 ère édition et sélection de photos
Sélection de toutes les photos
Application d'un pré-réglage
Exposition Automatique
Ajustement de l'exposition sur quelques photos
Sélection finale des photos avec un rendu optimal
Quand je veux aller vite, je ne passe dans le module de développement que pour quelques recadrages ou corrections minimes.
Le développement rapide dans le Module Bibliothèque de Lightroom Classic
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Le Mini Guide de la Photographie de rue
La Ville Miraculeuse - Paris, 2012
Qu'est-ce que la Photographie de rue ?
La photographie de rue est l'art de photographier des inconnus. Elle se pratique dans des lieux publics, que ce soit dans un parc, une gare, un centre commercial, une bibliothèque, un aéroport ou donc... la rue.
La Ville Miraculeuse - New York, 2011
Demander la permission
Est-ce qu'une photographie de rue doit être absolument naturelle et prise sur le vif ou est-ce que vous devez demander la permission ?
En fait, c'est un peu comme vous voulez. Parfois, vous voudrez vous approcher et demander un portrait. À d'autres moments, vous verrez une scène où il sera préférable de ne pas intervenir, où vous voudrez la capturer telle qu'elle est.
Quand je veux m'approcher très très près de mes sujets, je demande généralement la permission, mais pas toujours.
Pourquoi photographier dans la rue ?
En voilà une bonne question. Pourquoi photographier dans la rue ? Que cherchez-vous dans la photographie de rue ?
Personnellement je m'en remets à Joël Meyerovitz :
Un photographe de rue n’a aucune idée de ce qui va arriver chaque jour. Nous sortons dans les boulevards du monde, juste pour être dehors, et juste pour regarder la manière dont le monde continue à se présenter à nous avec des idées, des incidents et des moments de conscience.
Mais vous pourriez avoir différentes raisons d'apprendre et de pratiquer la photographie de rue :
Il y a toujours quelque chose de nouveau à voir, et cette pratique fonctionne particulièrement bien en voyage.
L'adrénaline ! Je peux vous assurer qu'une fois que vous aurez franchi le premier pas, vous aurez une bonne décharge. Certains y prennent simplement du plaisir.
La fonction sociale. On pourrait dire qu'un photographe de rue est d'abord un sociologue, qu'il montre ou démontre le monde qui l'entoure. Ou plus simplement, un photographe aime sincèrement les autres, la photographie de rue est d'abord une expérience humaine.
Pour aller plus loin :
Le meilleur appareil pour la photographie de rue
Pour la photographie de rue, je recommanderais un Ricoh GR, un Sony RX100 ou un Fuji X100, quelque soit la génération ils sont tous bons.
Mais vous pouvez certainement utiliser l'appareil que vous avez actuellement. Le meilleur moyen de pratiquer est de toujours avoir son appareil photo avec soi, c'est pour cela que je recommande des appareils compacts, qui tiennent dans une poche ou un manteau.
La meilleure focale ? Personnellement le juste équilibre se trouve à 40mm
Quelle est la meilleure focale ?
Si vous devez ne choisir qu'une seule optique, je vous conseille de choisir une focale fixe, sans zoom. Vous obtiendrez une meilleure qualité d'image, et cela vous forcera à vous déplacer et à être créatif dans vos compositions.
Si vous utilisez un viseur (optique ou électronique), la focale la plus polyvalente est le 35mm, et c'est parfait pour commencer. Si vous visez avec l'écran, à bout de bras, alors le 28mm est préférable. En allongeant le bras vous serez plus près de vos sujets.
La focale 50mm est également beaucoup utilisée. Elle fut notamment prisée par la légende de la photographie de rue Henri Cartier-Bresson. Je la trouve difficile à pratiquer pour mon goût, mais ce peut être un bon moyen de débuter, notamment parce que les optiques 50mm dites "Nifty Fifty" sont très abordables chez tous les fabricants. Vous trouverez généralement un premier prix avec les optiques 50mm F1.8.
D'une manière générale, la plus grande difficulté en photographie de rue est de s'approcher de ses sujets, une focale large (35mm et moins) vous y obligera et vous permettra de vous améliorer.
My Soul so Cool from the Bath of Light - Salvador de Bahia, 2019
Qui sont les grands maîtres en photographie de rue
Quel que soit le genre de photographie dans lequel vous souhaitez vous améliorer, étudiez les photographes reconnus et trouvez vos inspirations.
En photographie de rue, j'ai choisi les grands maîtres qui m'inspirent, trouvez les vôtres et étudiez leur manière de travailler :
La Ville Miraculeuse - Salvador de Bahia, 2019
Techniques de photographie de rue
Les techniques de prise de vues en photographie de rue sont faciles à résumer, elles correspondent toutes à l'un de ces deux principes :
Trouver un cadre et attendre ;
Trouver un sujet et le suivre.
Le principal frein au déclenchement en photographie est la peur, pour pratiquer la photographie de rue vous devrez vous confronter à vos peurs, et pour ça le meilleur moyen est de commencer par des portraits, pour vous habituer à aborder des inconnus. Puis vous pourrez petit à petit vous approcher et sauter l'étape de la permission. Alors seulement vous pourrez commencer à expérimenter des techniques créatives
Pour aller plus loin :
Primal NYC - 2019
Quel est le meilleur moyen de partager ses photos ?
Rien ne sera meilleur qu'un espace que vous contrôlez : ouvrez un blog gratuitement avec Wordpress.com et partagez vos photos sur un site à votre nom.
Ensuite vous pourrez partager vos photos sur les réseaux sociaux. Mon conseil est d'utiliser ceux dont vous avez l'habitude. Je déconseille les plateformes 500px ou Flickr si vous n'y êtes pas déjà. Si vous voulez expérimenter et chercher de nouvelles audiences, choisissez plutôt des plateformes en croissance.
Mais d'une manière générale ne passez pas trop de temps sur la diffusion de vos images, ça ne fera jamais de vous un(e) meilleur(e) photographe. En tout cas ne tenez pas compte des performances de vos photos sur les réseaux, surtout si vous débutez en photographie ou si vous commencez à peine à partager votre travail. Votre énergie sera mieux employée en travaillant sur un projet personnel au long cours. En plus il sera certainement plus regardé et partagé si vous le réalisez avec passion.
Aurez-vous toujours peur de photographier dans la rue ?
Depuis quelques jours il est à nouveau possible en France de sortir de chez soi sans permission. Pas pour toutes les régions, dans un rayon de 100km et sous certaines conditions pour les transports publics ou les écoles. On est pas sortis des ronces.
La bonne nouvelle, c'est qu'une bonne partie d'entre vous avez maintenant la possibilité de sortir de chez vous pour photographier. Fini les séances d'auto-portraits à la fenêtre ou de lamentation sur notre appareil photo qui prend la poussière.
Est-ce que ce déconfinement amènera plein de photographes dans la rue ? Probablement pas. Et ce pour une raison très simple : la peur.
La photographie de rue est la raison d'être principale de mes formations, c'est une expertise qui est peu enseignée. Et dans cette discipline, le principal frein au progrès ou même à simplement essayer est LA PEUR. Oui, j'aime bien penser que la photographie est un sport, qu'un genre photographique est une discipline et une photo une performance. Ça ne change rien à l'histoire, c'est juste une manière de me motiver.
Je suis donc prêt à parier que nous ne verrons pas beaucoup plus de photographes de rue dans les jours à venir. Mais si je peux vous aider sur la peur, je ne vais pas me priver.
Voici 3 méthodes qui doivent vous aider sur vos peurs. Je limite à 3 pour que vous puissiez les pratiquer rapidement.
Demandez la permission
Il pourrait paraître étonnant de conseiller de demander la permission en photographie de rue. Est-ce que je ne perds pas un moment authentique en réalisant un portrait ?
Alors, déjà non. Qui a dit que la photographie de rue devait toujours être volée ? Personne. Ou j'men fous.
Et puis nous sommes là pour travailler sur la peur de photographier des inconnus. Le meilleur moyen de progresser sur la peur est de s'y confronter, d'aller vers les autres, vers quelqu'un qui vous intéresse, sans forcément lever son boitier ou lui mettre dans le nez.
Allez vers quelqu'un dont vous aimeriez une photo et dites :
- "Bonjour, j'étudie la photographie. Est-ce que je pourrais prendre une photo de vous ?"
Ou toute autre version que vous trouvez polie et agréable. Vous avez le droit de sourire quand vous vous approchez ;)
Quand vous aurez demandé 10 fois la permission, vous verrez que la peur de photographier commencera à s'atténuer.
Posez des questions
Passez du temps avec les personnes que vous photographiez. Vous en apprendrez plus sur eux, vous verrez plus d'attitudes et de détails dans leur comportement, tout ce que vous pourrez utiliser dans vos photos.
Posez des questions simples, comme si vous essayez de comprendre en 5 minutes qui ils sont et ce qui les intéresse. Ce sera perçu de manière amicale dans 90% des cas, et dites-vous que c'est légitime puisque vous avez déjà demandé si vous pouviez prendre des photos. Vous êtes photographe :)
Proposez toujours d'envoyer la photo plus tard, prenez les coordonnées des personnes dont vous avez le portrait. Et puis envoyez effectivement la photo ! Je suis parfois coupable sur cette partie.
L'idée ici est de vous faire travailler votre scène pour aller chercher de meilleurs clichés.
La règles de 3
La règle de 3 est simple :
- Quand vous voyez quelqu'un d'intéressant, vous avez 3 secondes pour faire 3 pas en avant et déclencher
Les moments intéressants en photographie de rue passent trop vite :
- Soyez prêts sur vos réglages,
- Observez avec toute votre attention,
- Quand vous avez une intuition, ne réfléchissez pas,
- Marchez en direction de votre sujet et déclenchez.
L'idée est de ne pas laisser le temps à de fausses excuses. La peur viendra toujours par des chemins de travers : "j'ai pas le bon réglage", "il avait l'air bizarre", "je suis trop loin"...
Ne laissez pas le temps à la peur de s'installer et de justifier l'abandon de cette pratique. C'est difficile, mais ça ira mieux à partir de la 3ème fois.
1 pas en avant, 2 pas en avant, 3 pas en avant, déclenchez. En 3 secondes.
Si vous ne le faites pas pour vous, faites le pour moi
Ironie de l'histoire, alors que nous sommes à la maison depuis deux mois, le confinement strict arrive à Salvador de Bahia, dans notre quartier. Les statistiques du Covid-19 ne faiblissent pas, malgré la fermeture de tous les commerces et écoles. Je vais donc continuer à shooter à la maison...
Mais j'espère bien voir vos photos, où que vous soyez ! Vous avez un site ou un compte Instagram où vous partagez vos photographies de rue ? Laissez-le en commentaire, je serai heureux d'aller voir ça.
Martin Parr et les 100 Livres
Est-ce que la vie d'après, ce sera des conversations sur HouseParty et des lives sur Instagram ? En tout cas le pendant en est bien rempli. Parmi les millions de conversations à domicile qui pullulent sur Youtube, je vous invite à observer les échanges entre photographes de l'agence Magnum. Le principe est simple, deux photographes de l'agence tirés au hasard se posent trois questions.
Le hasard est bien fait, il a réuni Martin Parr et David Alan Harvey, deux monuments de la photographie contemporaine.
Voici ce que j'ai appris sur Martin Parr qui m'a surpris ou émerveillé :
Martin Parr a publié 110 livres
110 livres ! Martin Parr travaille sur deux nouveaux ouvrages en ce moment, sa production prolifique n'est pas près de s'arrêter. Probablement que personne au monde n'a toute la collection, à part un musée anglais vigilant.
Je me souviens m'être procuré The Last Resort à la MEP, il est malheureusement laissé derrière moi lors de mon installation au Brésil. C'est un livre que je trouve toujours extra-ordinaire, tellement simple et magique dans le message social qu'il porte.
Martin Parr rappelle ici que le livre est le meilleur véhicule pour la photographie. C'est une certitude, si nous ne travaillons pas sur un livre actuellement, nous passons certainement à côté de l'objectif majeur du photographe.
Allez, juste pour me motiver : à raison de deux livres par an, il me faudrait encore 53 ans pour rejoindre cette production. Franchement avec les progrès de la médecine, c'est jouable.
Martin Parr était enseignant avant de rejoindre Magnum
Je ne vais pas vous mentir, c'est l'information qui m'a le plus marqué dans cette discussion. Avant de rejoindre Magnum et de pouvoir exercer son regard dans les shootings les plus prestigieux, Martin Parr nous apprend que sa principale source de revenu était l'éducation à la photographie.
Parmi ses enseignements, l'exercice à Cuba pendant le Workshop de David Alan Harvey est savoureux :
"Pas de voitures américaines, et pas de jolies filles".
Martin Parr
Depuis que je suis au Brésil, l'éducation est devenue dominante dans ma vie. Pour mon plus grand bonheur, travailler sur des contenus et exercices pédagogiques a certainement fait de moi un meilleur photographe. Mais j'ai toujours dans un coin de ma tête que peut être l'enseignement se mettrait en travers de ma pratique.
Bien sûr que non, on peut être un bon photographe et un bon professeur, en tout cas j'essaye de le devenir. Ce que j'ai vraiment perdu dans la transition, ce sont des commandes commerciales ou institutionnelles. Et je travaille certainement plus sur des projets personnels maintenant.
Collectionné et Colectionneur
Non seulement Martin Parr est extrêmement prolifique, collectionné par les plus grandes institutions, mais il collectionne lui-même les livres photo. Il en a eu de toutes sortes et de tous les genres, ses livres sur l'histoire du livre photo sont remarquables.
On apprend dans cette interview qu'il a vendu sa collection de plus de 13 000 livres au Tate Museum, ce qui lui a permis de recueillir les fonds pour la Fondation Martin Parr.
Je suis rassuré, mon obsession pour les livres photo peut avoir une fin, un jour :)
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Pour conclure, je tiens également à vous renvoyer vers le travail fabuleux de David Alan Harvey, un des photographes que j'admire le plus. Vous pouvez aussi explorer Burn Magazine (en Anglais), qu'il dirige.
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Comment je règle mon appareil photo pour ne plus y penser
C'est probablement la partie de la pratique photographique à laquelle je pense le moins : le réglage de l'appareil. Néanmoins, lors du lancement de ma formation à la photographie, certains participants m'ont dit être débutants en photographie, ils ont acheté leur premier appareil photo il y a très peu de temps. Alors je tiens à préciser ici ce que je ne décris pas dans la partie technique de mon dernier livre : comment je règle mon appareil photo.
Avant tout je tiens à dire que ce qui suit n'est en rien une recommandation ou un conseil. C'est ma méthode, celle que j'emploie qui correspond probablement le mieux à ma pratique de la photographie. L'idée est ici de vous l'expliquer pour que vous trouviez la vôtre.
La technique, il est bon de la fréquenter pour la connaître intimement.
Après quoi elle doit vous ficher royalement la paix.
Robert Doisneau
Par défaut : Priorité Vitesse
Mon mode de prise de vue par défaut est le mode Priorité Vitesse. Les types de photographies que je pratique le plus sont dépendants de la Vitesse d'obturation. Que ce soit en commande ou en reportage, chez moi avec un enfant en bas âge, ou en photographie de rue qui m'occupe le reste du temps, je ne veux pas louper un moment qui passe vite parce que je serais réglé trop lent.
Ainsi, en mode Priorité Vitesse, je règle par défaut au 1/250e de secondes. Ma Sensibilité est fonction de la quantité de lumière, le plus souvent 400 / 800 ou 1200 ISO. J'ai tendance à commencer assez haut en sensibilité pour ne pas risquer de taper régulièrement dans la plus haute Ouverture, qui sera décidée par mon appareil.
Dans un mode semi-automatique comme la priorité Vitesse, ma mesure d'exposition est importante. Pourtant, je la change rarement voire jamais, elle est réglée sur le centre de mon image. Quand j'ai besoin de varier mon exposition, j'utilise la molette ou le contrôle de cette mesure d'exposition selon le boîtier.
Enfin mon autofocus est par défaut en AF-S Single Shot. Notamment en photographie de rue, je veux décider où est mon point, même sur des sujets en mouvement. Je ne passe en AF-C Continu qu'en famille, mon fils étant assez tonique :) ; ou lors d'un événement ou les mouvements sont intenses. Je travaille notamment pour une salle de sport, je réussi plus de clichés en AF-C dans ce cas là.
Pour aller plus loin :
Contrôlez le mouvement – le mini-guide de la vitesse
Paysage et Portrait : quand je veux maîtriser la profondeur de champ
Prenons l'exemple de la photographie de rue, mon appareil est le plus souvent réglé sur cette pratique. Je suis donc en mode Priorité Vitesse au 1/250e de secondes. Le contrôle de la vitesse me permet d'être créatif avec des vitesses très basses (en dessous du 1/60e de secondes), ou de figer des sujets très rapides en réglant facilement au 1/500e ou 1/800e de secondes.
Puis quand je bascule sur un portrait ou un paysage, où la profondeur de champ sera importante, je passe en priorité Ouverture et règle sur F2 à F4 pour le portrait et F8 à F16 pour le paysage. Pour un portrait je tourne la molette au moment où je commence à discuter et demander à mon sujet si je peux passer un peu de temps avec lui. Pour un paysage, par principe on va dire que j'ai le temps de régler précisément, puis d'attendre éventuellement qu'une scène au premier plan soit meilleure.
Pour aller plus loin :
Mode Programme (P) de plus en plus souvent
Depuis que je passe mes journées avec un Ricoh GR, je dois bien dire que le plus souvent je suis en mode de prise de vue P avec une sensibilité à 1200ISO. 80% du temps le Ricoh GR ira sur F5.6 et une vitesse plutôt élevée. Si jamais j'ai besoin de contrôler la profondeur de champ, je peux toujours mettre un coup de molette dans un sens ou dans l'autre.
En photographie de rue, le mode P + 1200 ISO est redoutable, ultra rapide. Mon autofocus est en mode Snap sur le Ricoh GR avec une distance à 3m, ce qui veut dire que dans la grande majorité des cas je n'ai pas besoin de faire de mise au point (le mode Snap saute l'étape de l'autofocus et reste calé sur une distance), tout sera net entre 3m et 10m devant moi. Avec la taille du boîtier et le mode Snap, je shoote plus, plus souvent, je peux travailler mes scènes beaucoup plus longtemps avant d'être repéré.
Pour aller plus loin :
Vous avez le droit d’utiliser un mode automatique
Trouvez votre système
Le réglage de votre appareil doit d'abord être contraint par votre intention créative. Partez de ce dont vous avez besoin, puis déduisez le réglage qui correspond le mieux. Les modes automatiques, s'ils sont bien maîtrisés, sont parfaits pour être plus rapide dans votre exécution. Je n'ai jamais vu le mode manuel comme une preuve d'expertise, j'y suis simplement contraint parce qu'un de mes boitiers a une mesure d'exposition défectueuse.
J'espère que ces petits réglages vous aideront, allez voir les articles en référence si ce que je vous raconte est encore trop complexe :
5 photographes inspirants pendant le confinement
J'ai cru pendant plusieurs semaines que tout allait revenir à la normale, je ne voulais pas voir que la situation actuelle allait durer. Puisque j'écrivais essentiellement sur la photographie de rue en ce moment, j'ai arrêté net d'écrire. Et puis j'étais occupé entre mes affaires personnelles qui ont pris un coup d'arrêt brutal, ma vie familiale qui a pris une place dominante dans les quelques heures que nous avons chaque jour, enfin avec les formations en direct et le programme l'Étincelle qui me prenait le reste jusqu'à son lancement.
Mais la photographie n'est pas sortie de ma vie, au contraire. Jamais je n'arrêterai, j'irai au bout en continuant à déclencher parce que j'aime trop voir, chercher, composer, raconter. Alors oui, ma famille a une place très importante dans les clichés que je sors, mais c'est très bien comme ça.
Ainsi donc voici 5 photographes que j'ai trouvé particulièrement inspirants pendant le confinement. Il semblerait que le sujet soit plutôt au déconfinement en France, mais je suis à peu près certain que nous passerons encore beaucoup de temps chez nous dans les mois à venir, ça ne peut être qu'utile. Je n'ai pas suivi toutes ces photographes dans leur démarche, mais j'ai trouvé tous ces projets ou clichés très inspirants, et quand j'ai produit quelques photos en pensant à eux je les partagerai également.
1. Elliott Erwitt
Le photographe légendaire New Yorkais Elliott Erwitt est connu pour sa photographie de rue, mais il a également publié quantité de photographies de sa famille, prises chez lui. Elles sont d'une douceur étonnante, tellement intimes en en même temps avec une pudeur bouleversante. Elliott Erwitt me pousse à prendre mon appareil aussi souvent que possible quand mon fils se réveille.
Photo Elliott Erwitt - Magnum
Photo Elliott Erwitt - Magnum. New York City. 1950.
Nous avons en commun avec Elliott d'avoir des chats à la maison, ce qui rend les sujets faciles à trouver :)
Photo Genaro Bardy
2. Martin Argyroglo
En référence à la Tentative d'épuisement d'un lieu Parisien de Georges Pérec, le photographe Martin Argyroglo photographie au jour le jour la place des fêtes du 19ème arrondissement de Paris. Il en produit beaucoup d'autres, allez voir son travail sur son site.
Photo Martin Argyroglo
Photo Martin Argyroglo
Photo Martin Argyroglo
Vivant au 14ème étage d'un immeuble, je me suis prêté également à l'exercice, mais je dois reconnaître avec moins de régularité.
Photo Genaro Bardy
Photo Genaro Bardy
Photo Genaro Bardy
3. Daido Moriyama
Le photographe originaire d'Osaka est souvent présenté comme le "Pape de la photographie de rue Japonaise". Il est notamment connu pour s'approcher plus que de raison de ses sujets, on pourrait dire qu'il pratique une sorte de "Macro urbaine", où les signes et symboles abstraits se mélangent à des affiches ou mots trouvés dans son quotidien.
Photo Daido Moriyama
Photo Daido Moriyama
Photo Daido Moriyama
Sans aller dans son côté brutal, je trouve intéressant de m'approcher et d'essayer de voir des formes à des distances nouvelles. Daido Moriyama a participé au développement du Ricoh GR que j'utilise aussi dans mon quotidien, avoir une optique macro a ouvert de nouvelles perspectives dans ma photographie.
Photo Genaro Bardy
Photo Genaro Bardy
Photo Genaro Bardy
4. Richie Lema
Les portraits de Richie Lema sont drôles, originaux, percutants. Je ne me lasse pas de me replonger dans les films dont il s'inspire et qu'il utilise pour ses auto-portraits... dans sa baignoire !!!
Ce projet est fascinant, fabuleux. Je serais bien incapable de m'inspirer de son travail, mais l'idée est remarquable et parfaitement exécutée, ça peut orienter les amateurs de portraits sur de nouvelles pistes.
https://www.instagram.com/p/B_fATOIIB6J/
https://www.instagram.com/p/B-UX_7yIEB9/
https://www.instagram.com/p/B-ezSm_o-iH/
https://www.instagram.com/p/B-rxTA8ITPj/
5. Erin Sullivan
Enfin terminons cette série d'inspirations par Erin Sullivan, photographe de voyages qui a décidé de mettre en scène son intérieur et de minuscules figurine pour reproduire des ambiances d'exploration et de grands espaces. Le résultat est spectaculaire, quel boulot !
https://www.instagram.com/p/B_AdfZppAE1/
https://www.instagram.com/p/B-uo3H4poLg/
https://www.instagram.com/p/B-YH5vIJl7R/
Rhétorique de la photographie
La photographie est un moyen de communication. Que vous communiquiez une histoire vraie, du journalisme, ou que vous ayez une intention artistique ou répondiez à un besoin commercial d'un client, une photographie sera toujours un moyen de communication.
De ce constat extrêmement simple se déduit une conséquence majeure dans la pratique photographique, le message de vos photos utilise une rhétorique.
Chaque photographie est un message
Avant d'étudier les différents moyens de mettre en pratique la rhétorique en photographie, observons l'effet de 3 types de légendes sur une même photographie :
La légende dite "technique" est en réalité une hérésie, elle ne dit rien de la photographie. Je vois trop de photographes rester sur ce premier niveau sans jamais pousser plus loin. À la limite on pourrait parler de technique de composition et du mouvement qui a amené cette photo, mais là encore ça ne donnera pas grand chose de consistant :
Non, toujours pas. Seule une légende digne de ce nom devrait accompagner cette photo.
Même caricatural, l'objectif de ce petit exercice est de montrer que la photographie est un message, et qu'une photo fonctionne toujours avec une légende.
Je vois déjà les commentaires qui ne manqueront pas de souligner que certains photographes partagent leurs photos sans légende, parce que leur photo se suffit à elle-même. Je suis le premier à ne pas toujours utiliser des légendes. Mais une photo sans légende contient dans son message ce que l'on connait du photographe dont on voit la photo. Même sans légende, un spectateur forme une représentation avec les informations dont il dispose.
Rhétorique de la photographie
En matière de rhétorique, définie comme "art du discours", rien de mieux n'a été conceptualisé depuis bien longtemps. En l'occurence par Aristote, dans son essai du même nom.
Aristote distingue 3 éléments fondamentaux en rhétorique : Logos, Ethos et Pathos.
Le Logos fait appel à la pure logique. Le message doit permettre à l'auditeur (pour nous le spectateur de la photo) de suivre une démonstration.
L'Ethos fait appel à l'autorité et la réputation. En photographie ce sera essentiellement amené par le contexte de la photographie, que ce soit un média, un roman, un post Instagram sponsorisé ou une exposition.
Le Pathos fait appel à l'émotion. En photographie il semble apparent qu'une photographie sans émotion n'aurait littéralement aucun sens. Néanmoins, certains types de photographies utilisent plus ou moins l'émotion en fonction de l'objectif de leur message.
Logos, Ethos et Pathos selon le type de photographie
Afin de mieux comprendre la rhétorique appliquée à la photographie, il me semble intéressant d'établir les différences entre 3 types de photographies. Chacune d'elles utilisera à la fois Logos, Ethos et Pathos, mais dans des proportions différentes selon l'objectif de leur message.
Dans le cas d'une photographie commerciale, l'objectif du message est la persuasion. Pour vendre, pour divertir ou pour démontrer, la photographie est au service d'un client qui communique auprès de ses propres clients. La photographie commerciale ou institutionnelle baigne dans le Logos. Une photo est ratée d'abord si elle ne sert pas l'objectif de communication du client.
Dans le cas d'une photographie destinée au journalisme, le message est une vérité. Cette vérité est subjective, elle se réfère au point de vue du photographe ou du média qui diffuse la photo, mais ce sera toujours une vérité. La photo doit montrer ce qui est, sans le transformer. Ainsi le photo-journalisme aurait pour valeur dominante dans son message l'Ethos. La réputation et l'autorité du média sont dominants sur le nom photographe dans la perception du message et donc de la photo. Dans le cas où le photographe n'est pas l'auteur de l'article ou de l'histoire, la qualité du journaliste qui complète le tandem peut être cruciale. Notons enfin qu'une grande part de l'Ethos vient de l'éditeur photo qui travaillera également au plus proche du photographe côté média.
Dans l'hypothèse, enfin, d'une photographie artistique, qui aurait pour objectif de présenter le message de son auteur. La rhétorique va être utilisée tant dans le contenu des photographies que dans le contexte : les légendes des photos, l'histoire racontée ou la manière de présenter les photographies. Une exposition ne présente pas le même contexte qu'un livre photo, c'est une évidence mais l'idée est ici de montrer que toute photo artistique sera accompagnée d'une histoire. Le message de la photo sera une partie de cette histoire. La photographie artistique aura, vous l'aurez compris, une valeur dominante dans le Pathos.
Encore une fois tout type de photographie fait appel à la logique, à l'autorité ou à l'émotion, simplement dans des valeurs dominantes différentes.
À titre d'exemple, prenons encore une même photo, légendée selon le Logos, l'Ethos ou le Pathos :
Cette photo aurait bien sûr pu vendre beaucoup d'autres choses.
Un message beaucoup plus classique, que j'ai utilisé dans le contexte d'une histoire pour un magazine de voyage : Serendipia by TravellerMade
Enfin un appel à l'émotion très personnel, que je suis susceptible d'utiliser dans une formation ou unworkshop. Il y aurait là aussi beaucoup d'autres manières de faire plus appel à l'émotion, en parlant du propriétaire, de la scène qui se déroulait ou de l'histoire des différents personnages présents sur cette photo.
Le contenu de cet article est issu du programme de formation à la photographie L'Étincelle.
5 exercices pour photographier à la maison
Comme plus de la moitié de la population mondiale, je suis à la maison depuis un mois. Le jour de l'annonce du confinement à Salvador était identique à celui de la France, alors que la propagation du coronavirus était nettement moins avancée. Cette décision du gouverneur de Bahia (le Brésil est un état fédéral) a certainement sauvé beaucoup de vies et soulagé un système de santé qui ne pourrait probablement pas encaisser le choc vécu en Europe ou en Amérique du nord. Ce n'est pas l'objet de cet article, je souhaite juste vous donner un peu de contexte personnel car on me pose beaucoup la question en privé.
À titre personnel mon activité professionnelle prend un coup d'arrêt brutal. Je travaille avec quelques magazines et agences de voyages, pas du tout avec la presse quotidienne ou dans l'actualité. Je ne suis pas journaliste, je reste donc à la maison. La seule activité que je peux continuer à distance est l'éducation à la photographie. J'ai décidé dès le premier jour de confinement de proposer deux ateliers en direct-live par semaine sur mon groupe Facebook. Mon temps disponible avec un enfant en bas-âge à la maison s'est nettement réduit, j'essaye de produire quelques vidéos pour Youtube (je les publierai quand j'aurai accepté que c'est mauvais et que j'ai besoin de progresser), mais il m'est impossible de prendre du temps pour écrire ici.
Et puis je dois reconnaître prendre beaucoup de plaisir à ces lives, c'est un exercice intéressant et j'apprécie les nombreux échanges avec ceux qui les suivent régulièrement.
Une fois sur deux, je commente les photos des participants aux exercices proposés la semaine précédente, puis propose 3 nouveaux exercices pour la semaine suivante. J'essaye moi aussi de produire des photos pour ces exercices, entre la sieste et le biberon. J'y trouve de l'inspiration et de la motivation à continuer à pratiquer notre passion dévorante. Peut-être que vous pourriez aussi vous prendre au jeu ?
Voici donc 5 des nombreux exercices proposés pendant mes lives, si vous voulez voir les photos des participants, ou que je commente vos photos dans le prochain live, il va falloir aller sur le groupe Facebook. Mais si vous voulez juste participer sur Instagram, utilisez #PhotographionsALaMaison ou mentionnez mon compte @naro1 - J'irai tout voir, même si je ne m'attends pas à avoir des milliers de participants. Mais sait-on jamais, vous pourriez peut-être y prendre du plaisir :)
5 exercices #PhotographionsAlaMaison
1. La Mouche
- Mettez-vous à la place d’une mouche.
- Que voit-elle ?
- Comment pourriez-vous représenter son point de vue ?
- Par quel artifice technique ?
Exercice inspiré par Martin Parr
2. La couleur c'est l'émotion
- Choisissez une couleur primaire Rouge / Bleu / Jaune / Vert ;
- Pendant une période fixe (1 heure / 1 jour ?), si vous croisez cette couleur, vous DEVEZ faire une photo.
- Composez avec la couleur telle qu’elle se présente.
Exercice inspiré par Alex Webb
3. L'ascenseur
- Photographiez un environnement clos et restreint, comme un ascenseur,
- Prenez l’exercice comme un paysage abstrait,
- Travaillez votre scène, une seule photo ne suffit pas.
4. 20-40-10
- Photographiez « 20 Pellicules de 36 », Soit 720 photos ;
- Si vous ne pouvez pas sortir, Photographiez chez vous. Le sujet est libre, c’est en photographiant que vous le trouverez ;
- Sélectionnez 40 photos dignes d’intérêt, imprimez-les ;
- Ne gardez que 10 photos et créez un ensemble cohérent.
Exercice inspiré par Jessica Lancaster
5. Dominos
- Retournez sur vos anciennes photos,
- Parmi celles que vous préférez, créez une série de 10 Photos,
- Chaque nouvelle photo répond à la précédente comme un domino : une couleur, une forme géométrique, un sujet, un signe, un symbole, une technique de composition, un élément technique…
- Essayez de rendre la série de + en + complexe :
une couleur + un sujet
puis répétition + profondeur de champ + symbole
Inspiré par Jason Fulford
Comment participer ?
Si vous voulez que je commente vos photos dans un prochain live, participez aux exercices sur le groupe Facebook ici : https://www.facebook.com/groups/genarobardy
Ou utilisez le #PhotographionsALaMaison sur Instagram
Bonnes photos ;)
Qu'est-ce qu'une grande photo ?
De temps en temps, je prends une photo qui me marque, dont le sentiment reste longtemps après la prise de vue. Cette photo m'obsède, elle reste gravée dans ma mémoire et mes pensées sans que je puisse la laisser de côté.
Qu'est-ce qu'une grande photo ? Déjà commençons par la définir, l'adjectif "grande" ne me convient pas forcément, c'est simplement le meilleur terme que j'ai trouvé pour l'instant, rien ne traduit parfaitement l'adjectif anglais "great". J'ai hésité avec une photo "forte", pour qualifier ce sentiment qui persiste, et j'ai rejeté une "bonne" photo qui pour moi va être beaucoup plus fréquente. Une bonne photo, c'est une photo que j'ai sélectionnée pour l'utiliser. Certains photographes professionnels, dont je suis, disent qu'une bonne photo est une photo vendue. Cette définition est parfaite, une bonne photo répond à un besoin de communiquer. Mais une grande photo, ou une photo forte, c'est en réalité une photo exceptionnelle, qui arrive rarement.
Je souhaite ici vous partager mes réflexions et mes lectures sur le sujet. Je ne crois pas que nous arrivions à la définition parfaite d'une grande photo, ni à déterminer comment la réaliser. Nous allons tourner autour sans l'identifier. Nous allons le voir, une grande photo est une sorte de MacGuffin de la photographie : on la cherche constamment, sans vraiment pouvoir la saisir. En réalité Hitchcock le disait très bien, un MacGuffin ce n'est rien, et pourtant tout le monde court après.
Donnez-moi une raison de me souvenir de cette photo
Commençons par l'essai de Sophie Howarth et Stephen MacLaren dans 'Street Photography Now'. Le passage est traduit par mes soins de la version anglaise, mais vous pouvez trouver le livre en Français (donc avec une autre traduction) :
Une grande photographie de rue doit susciter plus qu'un regard rapide et un moment de reconnaissance de la part du spectateur. Un sens de mystère et d'intrigue doit rester, et ce qui est caché est souvent aussi important que ce qui est montré. [...] Donnez-nous une raison de nous souvenir de cette photo. C'est la bonne question à poser, mais aussi celle à laquelle il est impossible de répondre. Comme le disait le grand photographe Robert Doisneau 'si je savais comment prendre une bonne photo, je le ferais à chaque fois'.
Sophie Howarth et Stephen MacLaren dans 'Street Photography Now'
Nous sommes en plein dedans. Une photo est exceptionnelle parce qu'elle donne au spectateur une raison de se souvenir d'elle au delà des deux secondes (deux dixièmes ?) que nous passons habituellement à regarder une photo. Puis Robert Doisneau nous dit simplement qu'une grande photo est un cadeau, et donc que la pratique photographique est une recherche parsemée d'échecs innombrables pour atteindre son but.
Virtuosité technique, composition originale et contenu captivant sont tous essentiels, même s'ils ne garantissent pas nécessairement une grande photographie de rue. Des trois, ce qui fait un contenu captivant est celui qui prête le plus à débat. [...] Parfois un photographe de rue capture quelque chose de vraiment inhabituel - un visage étonnant, un accident ou un crime. Mais plus souvent une photo de rue est remarquable parce qu'elle rend l'ordinaire extraordinaire.
Sophie Howarth et Stephen MacLaren dans 'Street Photography Now'
Voilà nos trois suspects : technique, composition et contenu. Il est évident qu'un contenu extraordinaire est le plus difficile à formaliser, à moins que vous ne pratiquiez de la pure mise-en-scène.
Mais je trouve ici une piste intéressante : rendre l'ordinaire extraordinaire. Cet aspect est intéressant car il implique fortement le spectateur, et donc aussi le photographe. Ce qui est ordinaire pour certains ne l'est pas forcément pour d'autres. On touche ici à une forme de subjectivité très utilisée en journalisme : la loi de proximité. La loi de proximité est le principe suivant lequel les informations ont plus ou moins d'importance suivant leur proximité par rapport au lecteur. Cette proximité est généralement décomposée en quatre axes : géographique, temporel, affectif et sociétal/socio-professionnel.
Je m'explique, en tête d'article cette photo de deux enfants à Salvador de Bahia n'aura pas la même résonance pour quelqu'un qui découvre Salvador en visite, pour celui qui y vit comme moi depuis presque 2 ans, ou pour quelqu'un qui y aura passé toute sa vie. Ce qui est ordinaire pour l'un est exotique pour l'autre, notamment pour celui qui n'y a jamais mis les pieds.
Si une grande photo rend l'ordinaire extraordinaire, alors ce qui la rend extraordinaire est par essence très subjectif, cela dépend fortement du spectateur.
Une grande photo doit être “dure”
J'aime particulièrement l'approche de Joël Meyerowitz, traduite ici depuis le livre Bystander :
Tant qu'il y aura la photographie, il y aura des personnes qui essaient de faire des photos "dures", comme celles que Garry Winogrand et moi essayions de faire il y a 25 ans. "Dur" est un terme que nous utilisions beaucoup. [...] "Dur" voulait dire que la photo était sans compromis. C'était quelque chose qui venait des tripes, de l'instinct, et c'était lourd d'une certaine manière, impossible de le caractériser selon les standards habituels. Donc c'était dur. Dur à aimer, dur à regarder, dur à réaliser, dur d'y trouver du sens. Ce n'était pas ce à quoi ressemblait les autres photos. [...] Vous ne pouviez pas vraiment le comprendre.
Joël Meyerowitz dans 'Bystander'
C'est à la fois limpide et parfaitement mystérieux. Une grande photo est une épreuve, la prise de vue implique le photographe et lui demande d'aller chercher, à l'extérieur et au plus profond de lui-même, en même temps.
Si une grande photo est incompréhensible, pourquoi chercher, pourquoi photographier ? Il suffirait de laisser le hasard s'en charger ? Bien sûr que non. C'est en cherchant, en composant, en racontant, que parfois les planètes, les étoiles, le soleil, les yeux et le coeur s'alignent. Pour obtenir une photo dure, il faut chercher des photos dures à réaliser. Je trouve ici un encouragement à aller photographier plus, plus souvent, à repousser mes petites limites pour aller chercher cette grande photo.
Obvie et Obtus
Poursuivons avec Roland Barthès et le passage du livre L'Obvie et L'Obtus. Essais critiques, livre qui ne traite pas seulement de la photographie mais également de la peinture ou de la musique. Dans la partie qui concerne la photographie :
Il me semble distinguer trois niveaux de sens. Un niveau informatif, ce niveau est celui de la communication.
Un niveau symbolique, et ce deuxième niveau, dans son ensemble, est celui de la signification. Est-ce tout ? Non.
Je lis, je reçois, évident, erratique et têtu, un troisième sens. Je ne sais quel est son signifié, du moins je n'arrive pas à le nommer, ce troisième niveau est celui de la signifiance.Roland Barthès dans 'L'Obvie et L'Obtus. Essais critiques'
Roland Barthès n'évoque ici que le contenu de la photo et tente d'aller au delà du signifiant, le niveau physique et technique de la photo, ou du signifié, ce que représente effectivement la photo, pour introduire le terme de 'signifiance'. Ce n'est pas seulement la symbolique, ce que peut vouloir dire le contenu d'une photo, c'est autre chose. Peut-être à chercher du côté de l'essai plus connu de Roland Barthes, La Chambre Claire . Il y fait la distinction entre deux types de photos et leurs caractéristiques : le Studium et le Punctum :
Le Studium, c’est une photo que l'on peut lire
selon les règles du savoir courant. On la regarde, mais on ne la mémorise pas.
[...]
Le Punctum, c'est l'élément imprévisible de l'image qui touche le spectateur. Car pour décrire ce genre de photo,
celles du punctum, il faut dire "je". Le punctum c'est "ce qui me point" Le Punctum n'est pas intentionnel. Il n'est pas composé volontairement, il n'est pas analysable.Roland Barthès dans 'La Chambre Claire'
Je ne sais pas si je suis beaucoup plus avancé. J'ai plutôt ici des confirmations de ce que je pressentais. Déjà une grande photo, à supposer que j'y associe le Punctum de Barthes, c'est "ce qui me point", ce qui me touche. C'est éminemment personnel, et donc subjectif. Ce qui sera une grande photo pour moi, ne le sera pas forcément pour les autres.
Et enfin le mystère s'épaissit puisque le Punctum ne serait pas composé volontairement, ne serait pas analysable. Il serait alors impossible à reproduire. C'est en phase avec ce que nous avons vu jusqu'à présent.
Je reconnais instantanément une grande photo
Et moi dans tout ça ? Déjà, je dois reconnaître que je sais au moment du déclenchement quand je vais avoir une photo que je trouve extraordinaire. Je vois la scène se dérouler, je suis dans la zone, dans cette recherche ou tout mon esprit est concentré vers une photo que j'espère. J'ai une sorte d'intuition, les éléments se placent de manière harmonieuse, et un incident particulier arrive qui place la scène parfaitement dans le cadre et lui donne une tournure forte.
Ainsi donc, je sais instantanément que je vais avoir une photo que je vais adorer. Cela me plonge dans un état d'excitation intense, probablement parce que je suis passionné par cette activité, j'ai l'impression d'avoir atteint un sommet.
Et pourtant je dois reconnaître que ce sentiment si particulier d'être arrivé à quelque chose d'extrêmement satisfaisant m'est arrivé également au développement, pas à la prise de vue. Mais je sais aussi que la photo concernée avait été prise le jour même et que je l'ai développée parce que j'avais l'intuition d'un bon potentiel. En fait, je crois que c'est avec l'expérience que j'arrive à reconnaître ces moments-là.
Pour moi, c'est un moment de grâce, où on reconnait que la photo que l'on a prise transcende simplement le sujet, le lieu ou l'instant qui ont été choisis. La photo est convenablement exposée, les éléments qui composent la photo semblent parfaitement alignés, tout cela est un pré-requis. Et puis il y a un petit quelque chose en plus.
Ce petit quelque chose en plus, pour moi c'est un incident. Un regard qui révèle, un geste physique caractéristique ou l'esprit du lieu qui est parfaitement représenté.
Le point de connection émotionnelle
Je conclurai cette réflexion sur la grande photo ou la photo forte par les mots de Susan Meiselas, photographe de l'agence Magnum. Elle parle bien de ce mystère, par essence subjectif, que j'appelle parfois incident ou moment de grâce, qui caractérise une grande photo. Elle parle de "point de connection émotionnelle" :
Qu’est-ce qui fait une bonne photo ? C’est une question difficile, pourtant il y a quelques principes fondamentaux - par exemple les règles de composition, le nombre d’or, les lignes directrices et ainsi de suite - même si vous exécutez une photographie à la soit disante perfection technique, il n’y a pas de garantie que cela résulte en une photo engageante.
Ce qui est souvent cité comme élément clé d’une photo réussie est un point de connection émotionnelle, en combinaison avec un puissant sens de la forme.
Parfois, que vous photographiez dans la rue, pour un projet, pour quelqu'un ou pour vous-même, une photo touchera un point sensible. Une vibration particulière dans un cadre parfaitement composé, dans un instant qui révèle tout ce que vous vouliez exprimer. C'est ce point de connection émotionnelle qui sera reconnu par d'autres qui regardent votre photo et qui voudront encore y passer quelques secondes de plus. C'est la photo qui vous fait vous arrêter dans une expo. C'est une grande photo.
Je terminerai avec les mots de Martin Parr qui répondent parfaitement à ceux de Robert Doisneau cités plus haut :
Si je savais comment prendre une grande photo, j'arrêterais.
Comment travailler votre jeu de jambes en photographie de rue
La principale caractéristique de la photographie professionnelle qui me surpris quand je commençais à vivre de la photo : sa physicalité. C'est aussi pour cette raison que j'ai choisie et poursuivie cette carrière, mais j'ai tout de même été étonné par ce que les prises de vue peuvent demander en énergie, à quel point elles peuvent être épuisantes.
La photographie de rue est une performance physique
En photographie de rue, une des premières vidéos que j'ai regardé sur le sujet montrait Henri Cartier-Bresson en train de danser comme un pantin funambule autour d'un passant dans les rues de Paris. J'étais débutant en photographie et passionné par Henri Cartier-Bresson, je regardais ses arabesques du corps comme un moustique fasciné par une flamme d'allumette.
J'y vois maintenant autre chose : de la composition. Pour mieux connaître la photographie, je reconnais maintenant la recherche d'un moment, d'un bon cliché pour un sujet qui l'a intéressé.
Regardez ses jambes, ses pieds, vous verrez le lien direct entre la composition et le mouvement du corps. Les photos, c'est comme les crêpes, elles ne vont pas se faire toutes seules. Et comme une poêle a besoin d'être bien beurrée, le photographe a besoin de travailler son jeu de jambes.
Le moment parfait est une recherche
Contrairement au peintre qui plante ses pieds dans la vase en misant tout sur son jeu d'index, l'auriculaire levé vers le ciel, le photographe est un animal prédateur. L'oeil vif, la bave aux lèvres et parfois le flash haut perché, il chasse le 1/125 de secondes qui fera mouche.
Si la photographie est physique, le cliché parfait, lui, est une recherche permanente. La cause est toute simple, expliquée dans cette phrase de Raymond Depardon qui devrait être tatouée sur l'épaule, à côté d'un triangle d'exposition :
Si je savais comment faire des grandes photos, je ne ferais que ça.
Raymond Depardon
La pratique de la photographie est une recherche, on ne décide pas d'avoir une grande photo. On en a l'intuition, mais en réalité chacun de nos déclenchements est un espoir. Quiconque a édité quelques milliers de clichés sait qu'une grande photo est une rareté, dont on ne maîtrise pas vraiment la production.
Pour chercher, il faut marcher. Si je voulais vous donner une méthode simple de recherche et de composition en photographie de rue, quelle que soit la scène, l'événement ou la situation :
Commencez par déclencher tout de suite tout droit ce que vous avez vu d'intéressant, en essayant de composer à la volée. Le Giga Octet ne vaut rien, profitez-en ;
tournez autour de votre sujet. L'angle à 45° de chaque côté, plongée, contre plongée, 90° de chaque côté et puis allez vérifier de l'autre côté, selon d'où vient la lumière ;
combinez tout cela avec 3 valeurs de plan : plan large, plan moyen, plan serré. Avoir un zoom ne facilitera rien, il faudra souvent vous approcher, parfois vous éloigner.
Voilà comment pour une seule et unique photo, je viens de résumer 37 clichés différents, tous pris depuis un endroit différent (vous pouvez compter). Évidemment cette théorie est impossible, pour la simple raison que les moments intéressants passent trop vite.
En réalité, avec l'expérience vous aurez travaillé un arsenal de compositions avec lesquelles vous serez à l'aise et vous arriverez à réduire le nombre de clichés à prendre, parce que vous saurez quand vous en aurez un bon instantanément, au déclenchement. Vous travaillerez seulement quelques valeurs de plan pour pouvoir éventuellement raconter cette petite histoire de différentes manières. Et puis vous aurez rarement plus de deux angles intéressants sur une scène.
La composition, c'est le jeu de jambes
Mais le jeu de jambes, lui, sera toujours là. Il sera au service de votre composition, de cette recherche. On pourrait même juger du talent d'un photographe uniquement en le regardant bouger.
Et d'ailleurs, c'est possible et c'est même tout simple. Le jeu de jambes d'un photographe peut et doit s'étudier. Tout comme je vous conseillerais de vous entraîner à regarder des photos en analysant les éléments techniques employés, notamment la focale ou la distance au sujet ; je vous recommande d'étudier et d'analyser le jeu de jambes d'autres photographes.
Comment ?
Et bien la qualité d'un photographe se juge sur une planche-contact, ou sur une série de 36 déclenchements si vous travaillez avec un appareil électrique et une carte mémoire plutôt qu'une pellicule.
La planche-contact dit tout du photographe. Comment il a bougé, ce qu'il a vu, quand il a déclenché, s'il a eu besoin de rafale. Plan large, plan moyen, plan serré, tout y est.
Pour commencer à étudier des planches contact, je vais vous renvoyer vers un livre, encore. Il vous permettra d'étudier le travail, et donc aussi le jeu de jambes de certains des plus grands photographes au monde : ceux de l'agence Magnum dans le livre Contact Sheets. (Le lien est vers la version US, la VF étant à plus de 200€).
La planche-contact pour étudier le mouvement du photographe
À force de recommander des livres, je vais finir par créer un Photo-Book Club par abonnement avec un livre par mois. Et si c'était une bonne idée ? Note pour plus tard : créer un Photo-Book Club.
Commençons par étudier une photo iconique d'un de mes photographes préférés, le Chihuahua d'Elliot Erwitt.
Elliot Erwitt, contact sheet for “Chihuahua,” New York City (1946) (© Elliot Erwitt / Magnum Photos)
La séquence est merveilleuse. Elle commence par deux femmes qui se parlent devant un diner (restaurant) au coin d'une rue de Manhattan, l'une d'elle portant son adorable petit chien. Le premier cliché capturé est un plan moyen, testé en plusieurs versions. Les premières photos ont manifestement déclenché une discussion du photographe avec ces deux femmes, s'ensuit une série de plans serrés, avec la complicité de la propriétaire du Chihuahua qui participe à la séance photo en le posant au sol.
Notez que le cliché retenu par Elliot Erwitt est très largement recadré, au nom d'une composition parfaite. Cette planche-contact me replonge dans mes innombrables rencontres en Toscane ou à New-York qui ont eu pour cause ma passion infinie pour les canidés, mais je m'égare.
Poursuivons sur un sujet plus difficile, avec les évènements de mai 1968, sous l'oeil de Bruno Barbey.
Bruno Barbey, contact sheet for student protests in Paris (1968) (© Bruno Barbey/Magnum Photos)
La séquence permet d'appréhender le travail dans le cas d'un événement, où les scènes sont en mouvement permanent.
La planche-contact commence au plus près des policiers, dans leur dos. Elle se poursuit avec une série de plans larges interrompus par quelques manifestants qui passent devant le photographe. Puis une charge de police occupe le photographe sur 4 clichés. La séquence se termine sur une barricade.
Notez déjà comment chacune des photographies est rigoureusement composée, quelle que soit la valeur de plan. Vous pouvez ensuite apprécier directement le travail d'édition, le choix des photos les plus fortes et le ratio, implacable : 6 photos retenues sur une séquence de 36. C'est le ratio d'un grand maître, à plus forte raison quand j'aurais aisément gardé les 32 autres.
Terminons enfin l'exercice sur une photo du premier livre de Martin Parr, Last Resort.
Martin Parr, contact sheet for The Last Resort (1985) (© Martin Parr / Magnum Photos)
Cette mini planche-contact montre en huit photos comment Martin Parr a travaillé les scènes et exploité la sérendipité inhérente au procédé photographique. Il utilise ici cinq clichés en étant positionné au même endroit. Il travaille la scène avec une seule valeur de plan, et ne garde qu'un cliché, celui où la femme se retourne.
Appliquez ces principes dans l'analyse de vos photos
Il ne vous reste plus qu'à vous procurer Magnum Contact Sheets si vous souhaitez étudier la manière de travailler de certains des plus grands photographes du 20e siècle.
Vous pouvez également analyser vos séries de clichés pour identifier les manques en composition ou les mouvements que vous auriez pu créer. Puis vous pourriez commencer à identifier votre ratio de photos gardées, non pas pour moins déclencher, plutôt pour varier les valeurs de plan et mettre en pratique lors de votre prochaine session, avec votre jeu de jambes.