La bombe sous la table - Comment améliorer une idée de projet

L'atelier 'Développez votre style' en photographie de rue à Paris s'est bien passé, je crois pouvoir dire que les participants sont repartis en ayant appris quelque chose sur eux-même et leur photographie. En tout cas c'est ce qu'ils m'ont exprimé, j'attends encore les réponses au questionnaire que certains ont envoyé à Photographes du Monde.

Pour ma part, ce fut une expérience remarquable à plusieurs titres. Tout d'abord en le préparant j'ai l'impression d'avoir encore franchi quelques pas dans ma photographie. Je voulais tellement que le contenu soit intéressant que j'ai lu à peu près tout ce que j'ai trouvé sur les sujets abordés, notamment sur la manière de raconter une histoire, qui est pour moi très utile à la construction d'un projet photographique. C'est ce qui va nous occuper aujourd'hui, vous allez comprendre pourquoi.

Avant de commencer et puisque nous parlons de projet photo j'aimerais vous inviter à découvrir le travail de Thomas Hammoudi, si vous ne le connaissez pas Thomas est un photographe qui a eu la merveilleuse idée d'écrire sur la photographie en tant que pratique artistique plutôt que de parler matos ou de pratique professionnelle comme le font la plupart (tous?) des blogueurs/youtubeurs. Thomas a écrit un livre sur la construction d'un projet personnel en photographie, l'acquérir serait un très bon moyen de progresser. Il produit aussi des vidéos remarquables sur des photographes de génie ou la photographie en général, allez-y et abonnez-vous, c'est probablement le meilleur contenu que vous pourrez trouver en Français sur Youtube.

Un projet photographique est une histoire

Passons si vous le voulez bien à cette bombe sous la table, celle dont vous entendez le minuteur depuis que vous avez lu le titre. Ce serait bien qu'on la désamorce avant qu'elle n'explose. Car vous savez qu'elle est là, et au delà du clickbait que l'artifice m'a permis, c'est tout le principe de la bombe sous la table dans une histoire : on sait qu'elle est là.

Il est pour moi établi qu'un projet photographique, ou une série si vous préférez, ou un reportage si vous êtes journaliste, EST une histoire. C'est une histoire qui utilise des médias et formats différents d'un film de cinéma (duh), mais qui utilise exactement les mêmes principes et mécaniques pour arriver à ses fins. Ainsi étudier et analyser les grands classiques du cinéma ou certains grands réalisateurs contemporains (je ne te regarde pas Marvel, tu peux passer ton chemin) doit vous permettre de mieux raconter une histoire, et donc d'améliorer votre projet photographique, aussi simple et trivial puisse-t-il paraître.

À titre d'exemple je ne saurais trop vous conseiller d'étudier le concept de 'monomythe', développé par Joseph Campbell à partir de la fin des années 1940, qui avance l'idée que tous les mythes du monde racontent essentiellement la même histoire, dont ils ne seraient que des variations. Dans son livre Le héros aux mille et un visages, paru en 1949, Campbell avance ce qu'il affirme être une structure universelle de tous les mythes du monde, qui relateraient le voyage du héros (The Hero's Journey). J'arrête ici l'analogie, je réalise que cela méritera largement un article que j'ai déjà plaisir à imaginer écrire.

Surprise versus Suspense

Et la bombe me direz-vous ? J'y viens. Elle va bien finir par arriver rassurez-vous. Car une bombe est ainsi faite, on sait que si on ne fait rien pour la désamorcer elle finira toujours par exploser. La bombe sous la table est un principe narratif qui permet de distinguer la surprise du suspense, il a été conceptualisé par le grand maître du suspense Alfred Hitchcock dans le livre de François Truffaut 'Le Cinéma selon Alfred Hitchcock' (1966) :

Alfred Hitchcock : La différence entre le suspense et la surprise est très simple, et j'en parle très souvent. [...] Nous sommes en train de parler, il y a peut-être une bombe sous cette table et notre conversation est très ordinaire, il ne se passe rien de spécial, et tout d'un coup : boum, explosion. Le public est surpris, mais, avant qu'il ne l'ait été, on lui a montré une scène absolument ordinaire, dénuée d'intérêt. Maintenant, examinons le suspense. La bombe est sous la table et le public le sait, probablement parce qu'il a vu l'anarchiste la déposer. Le public sait que la bombe explosera à une heure et il sait qu'il est une heure moins le quart — il y a une horloge dans le décor ; la même conversation anodine devient tout à coup très intéressante parce que le public participe à la scène. Il a envie de dire aux personnages qui sont sur l'écran : « Vous ne devriez pas raconter des choses si banales, il y a une bombe sous la table et elle va bientôt exploser. » Dans le premier cas, on a offert au public quinze secondes de surprise au moment de l'explosion. Dans le deuxième cas, nous lui offrons quinze minutes de suspense. La conclusion de cela est qu'il faut informer le public chaque fois qu'on le peut, sauf quand la surprise est un twist, c'est-à-dire lorsque l'inattendu de la conclusion constitue le sel de l'anecdote.

C'est habile dans son énoncé, c'est merveilleux lorsque c'est bien mis en pratique. En impliquant le spectateur, on l'incite à poursuivre l'histoire avec un intérêt décuplé.

La bombe est dans le titre

Vous commencez peut être à voir comment mettre cela en pratique dans un projet photographique. Cela m'a percuté lorsque j'étudiais (en regardant son film hein, autant travailler en s'amusant) le dernier film d'un autre maître du suspense : Quentin Tarantino avec 'Once Upon a Time in Hollywood'. Si vous n'avez pas vu ce film je vais divulgâcher la fin, revenez lire cet article quand vous l'aurez vu.

L'intégralité du film de Quentin Tarentino est une bombe sous la table. Toute la communication sur le film a été faite autour de l'histoire de la famille Manson. C'est un fait divers US largement connu localement où une starlette de cinéma a été assassinée avec une grande barbarie. Si vous ne saviez pas ça en regardant le film, vous avez pu le trouver très long. Mais si vous connaissez ce fait historique, vous savez qu'il y aura une scène ultra violente à un moment où un autre, la fameuse bombe sous la table qui sublime cette histoire et certains de ses accessoires. On pourrait d'ailleurs tout aussi bien renommer le 'fusil de Tchekov' en 'lance-flammes de Tarantino'.

En fait Quentin Tarantino joue avec les codes du cinéma de genre historique en créant deux personnages fictifs joués par Leonardo di Caprio et Brad Pitt qui vont se retrouver au coeur de l'attaque des Manson dans la maison à côté des faits réels, ajoutant la surprise au suspense dans son dénouement. Une bombe sous la table de 2h30, avec une critique sociale acerbe sur la machine à broyer des acteurs d'Hollywood et Los Angeles, quel génie mes amis. Mais je m'égare encore... voyez comme cette bombe est amusante, je peux parler de n'importe quoi vous aurez toujours envie d'avancer d'un paragraphe pour savoir si oui ou non je vais finir par m'expliquer, bordel. Ça suffit maintenant, pardon mais zut.

La bombe sous la table, pour un projet photographique, où puis-je bien la placer pour le spectateur ? Quel est le seul élément que l'on connaisse systématiquement d'un projet photo, d'un livre photo, d'une série photo, d'un reportage ? Son titre. Sa petite description d'ascenseur si vous êtes plutôt 'startup nation'.

Sans surprise, quelques exemples

Tous les projets qui m'ont fasciné dans leur réalisation, proposés par de grands photographes, ont un titre qui pose une question, tout en disant de quoi il s'agit.

  • L'exploration sociale du métro New Yorkais de Bruce Davidson s'appelle simplement 'Subway' (qui est l'appellation New Yorkaise du métro, à Londres c'est l'underground).

  • Les diptyques et triptyques de Barbara Probst dans lesquels un sujet est pris en photo simultanément selon plusieurs angles sont nommés 'Exposure'.

  • En reportage Matjaz Krivic avec ce titre 'Lithium Road' transforme des photos qui pourraient paraître banales prises individuellement en un sujet puissant sur les mines d'extraction de silicium qui permettent d'équiper nos téléphones intelligents.

  • Allez n'ayons pas peur de donner un point Cartier-Bresson à cet article (le point Cartier-Bresson est l'équivalent du Point Godwin en photographie), 'Images à la sauvette' est une formidable bombe sous la table pour un recueil de photographies de rue qui n'ont en commun que leur parfaite composition.

Vous m'excuserez de parler de mon travail, mais j'ai toujours pensé que 'Désert dans la Ville' (Desert in the City) était une bonne idée te titre, que le principe du projet énoncé dans le titre était une bonne clé d'entrée dans le projet. Cette 'bombe sous la table' donne envie d'en savoir plus. Les exemples sont infinis, j'ai essayé d'en donner quelques anciens comme des contemporains, autant dans la photo purement artistique, de reportage ou sociale. Mais tous ces genres ne sont-ils pas intimement liés ?

Photographier l'impossible

Oui mais et alors bon, c'est bien beau mais c'est à dire que c'est quoi le rapport avec MES photos. Ce qui va nous inciter à suivre un projet, à tourner les pages d'un livre, ce qui constitue en fait la bombe sous la table que nous avons désignée dans le titre de notre projet, est le fait que la réalisation de ces photos semble impossible.

  • Avec Bruce Davidson, son livre a une valeur historique. Mais même à l'époque il était le fruit d'un travail dantesque dans tous les quartiers de la ville, cela parait impossible.

  • Le concept intrigant de Barbara Probst laisse imaginer la complexité de la mise en oeuvre de ces images.

  • Objectivement en reportage vous trouverez toujours des photos fascinantes si le sujet est à la fois exotique dans sa localisation et proche de nous dans son sujet. C'est un travail conséquent et un sujet passionnant, voilà l'impossible de Matjaz Krivic.

  • J'ajouterais que l'impossible est un des éléments qui rend le travail de Bruce Gilden époustouflant. Si vous avez essayé de prendre des photos au flash à un mètre de vos sujets sans demander la permission, vous voyez de quoi je parle. Ça prend aux tripes, c'est dur, c'est 'impossible'.

Enfin je finirai ma boucle en revenant sur ce que me disait l'un des participants à mon atelier de photographie de rue du mois dernier à Paris, il me disait avoir commencé une série sur les lampadaires de Paris. Sans voir son travail je lui disais comment à mon avis on pouvait rendre cette idée plus forte : en passant par exemple un temps long sur un endroit pour voir l'évolution de la vie (ou de son absence) autour et en dessous dudit lampadaire, du jour vers la nuit ; ou encore en faisant un lien avec la fonction sociale du lampadaire, son histoire dans les plans d'architecture urbaine parisienne, ou tout simplement avec de belles photos de nuit sans personne pour en montrer l'absurdité. Je prends le lampadaire comme exemple pour forcer le trait, mais je crois sincèrement qu'il n'y a pas de petit sujet pour un essai photographique. Appelez ce projet "Pollution Lumineuse" et vous aurez à mon avis une belle bombe sous la table.

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Photo de rue à New York

Je suis de retour de mon dernier voyage photo à New York. Et je dois bien reconnaître prendre un plaisir nouveau à la photographie de rue. Concevoir la Masterclass qui arrive dans moins de deux semaines et écrire un livre pour enseigner la photographie m'a obligé à réfléchir, à étudier mon propre travail pour les illustrer. Et j'ai le sentiment d'avoir franchi un pas dans ma photo de rue.En revanche pour la cohérence, cette série n'en aura pas au-delà du lieu : New York. J'ai décidé de travailler différemment chaque jour, avec une thématique technique, de style ou de méthode de prise de vues particulière. Vous devriez reconnaitre le changement de journée assez facilement :)Je travaillerai à mon retour de Paris sur des séries cohérentes, mais je tenais à partager ici le résultat de mes recherches avec certaines des photos partagées sur les réseaux en direct, pour quasiment toutes avec le Jpeg direct sans aucune retouche, à part pour celles en noir et blanc.

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5 exercices pour débutants en photographie

Je ne connais pas de meilleur moyen pour progresser en photographie qu'un exercice que l'on se donne sur une courte période de temps. En voici 5 que vous pouvez réaliser dans le prochain mois, à raison d'1 par semaine.Je voulais commencer cet article par le plus commun des projets, le projet 365. C'est l'équivalent de la règle des tiers en composition : certains vous diront que c'est absurde, que ce n'est pas véritablement un projet, blablabla. Je vois surtout que c'est un excellent moyen de pratiquer différents genres en photographie, de chercher ce qui vous plait vraiment dans cet art, mais surtout c'est un des meilleurs moyens d'apprivoiser votre appareil. Et c'est tout l'objet des exercices que je vais vous proposer ici, mais l'essence même du projet 365 est qu'il dure un an, avec une photo publiée par jour qui a été produite le jour même.La photographie n'est pas exempte du besoin d'entrainement. Certains vous conseilleront d'aller vers la photographie argentique pour ralentir votre pratique et réfléchir à ce que vous faites, ce conseil est absurde. Si vous voulez faire de la photo argentique, faites de la photo argentique, mais cela n'a rien à voir avec le fait de progresser en photographie. Vous avez besoin de vous entrainer avec votre appareil, quel qu'il soit. Et pour moi le meilleur conseil  serait : réalisez 10 000 clichés différents aussi vite que vous le pouvez. Attention je parle bien de réaliser des photos, de travailler votre oeil et votre composition, pas de déclencher en rafale ;)Si vous voulez devenir gymnaste, vous aurez besoin d'entrainement. Si vous voulez avoir un peu de tenue sur un parcours de Golf, vous aurez besoin d'entrainement. Si vous voulez jouer de la guitare, vous aurez besoin d'entrainement. La photographie est strictement identique de ce point de vue : si vous voulez devenir photographe, vous aurez besoin de ne plus avoir à penser à votre appareil photo, pour qu'il soit une extension de votre oeil, de votre cerveau et de votre coeur - vous aurez besoin de développer un arsenal de compositions. Et pour ça, vous aurez besoin d'entrainement.Je ne connais pas de meilleur entrainement qu'un prétexte pour vous retrouver en situation de commande : vous avez "besoin de faire cette photo" parce qu'elle fait partie d'un exercice, d'un entrainement. Je n'ai jamais autant progressé que lorsque j'ai commencé à avoir des clients, la commande et l'obligation de sortir des clichés qui répondent à un besoin d'un client m'ont poussé à devenir meilleur. Si vous débutez en photographie, commencez par être votre premier client : vous voulez réaliser de meilleures photos. Pour ça : VOUS AVEZ BESOIN D'ENTRAINEMENT !Alors entrainons-nous mes bons ! Et amusons nous à mener à bien ces exercices, peut être que vous y prendrez plus de plaisir qu'à lire ces énoncés :)

Fast & Jpeg

Retournez à la racine de la photographie : l'instantané ! Evitez d'avoir à penser au développement, au fichier RAW qui passe dans un logiciel et que vous fignolez pendant des heures. La photo est un plaisir avant toute chose et entrainez-vous à la composition sans avoir à penser à la technique :

  • Choisissez un mode de prise de vue semi automatique A, S ou P
  • Choisissez un format de fichier Jpeg seul sur votre boitier
  • Définissez un mode créatif depuis le menu de votre boitier : une pellicule ou noir et blanc. N'hésitez pas à modifier le style créatif de manière assez radicale pour avoir une série de photo qui sorte de l'ordinaire. Personnellement je choisis de temps en temps un noir et blanc très contrasté.
  • Passez deux heures autour de chez vous ou de là où vous êtes en essayant de construire un "arsenal de compositions". Je vous en ai proposé 9, mais il pourrait y en avoir beaucoup d'autres, choisissez des compositions qui vous ressemblent.
  • Essayez d'obtenir une photo "forte", "intéressante", voire "fascinante" dans chacune des compositions que vous avez choisies, mais toujours avez le même style.
  • Ne développez pas les photos, choisissez les meilleures sans aucune modification.
  • Publiez la série sur vos réseaux sociaux sans aucun commentaire et observez lesquelles ont le plus de "succès".

7 kilomètres à pied

Je pratique cet exercice partout où je passe plus de 7 jours, c'est particulièrement efficace en vacances. Mais ce projet est vraiment fascinant si vous le faites autour de chez vous, dans un endroit qui vous est extrêmement familier. Vous serez surpris de ce que vous pourrez découvrir simplement en sortant de chez vous.

  • Partez dans une nouvelle direction chaque jour, toujours avec le même point de départ
  • Si vous avez l'impression de n'avoir que deux routes, prenez à travers champ à partir du 3ème jour
  • Marchez 1 kilomètre, puis revenez. Cela devrait vous prendre 1/2heure si vous êtes pressé, 1h si vous prenez le temps de penser à votre composition
  • Regardez les détails, les répétitions, les textures. Changez d'angle, n'hésitez pas à expérimenter.
  • Et surtout observez tout ce que vous ne prenez pas le temps de voir habituellement.
  • Profitez-en pour aller rencontrer ceux que vous croisez et réalisez quelques portraits.
  • Ne gardez qu'une photo par jour.

C'est quoi ce bordel ?

Probablement l'exercice le plus curieux pour ceux qui vivent avec vous. Mais vous êtes un.e artiste, vous n'avez pas à vous justifier !

  • En utilisant uniquement des objets du quotidien présents chez vous, fabriquez une installation qui permette de tester une grande loi de la Physique.
  • La gravité de Newton, le principe d'Archimède, la troisième loi de Lambert en photométrie, la relativité d'Einstein, ou toute autre loi physique que vous trouvez fascinante.
  • Photographiez cette expérience.
  • L'expérience n'a qu'une valeur d'illustration et n'a pas besoin d'être scientifiquement valide (je vous vois venir hein).
  • Préparez des excuses énoncées sur un ton péremptoire : "c'est pour les besoins de ma vie d'artiste !"

Et tu fais quoi dans la vie ?

Les meilleures histoires sont sur le pas de votre porte. Vous aurez besoin de reconnaitre à un moment ou un autre qu'en photographie vous devez aborder des inconnus. Et que ça se passe généralement très bien.

  • Sonnez chez votre voisin et présentez-vous.
  • Demandez-lui si vous pouvez le suivre jusqu'à son travail dans les jours qui viennent.
  • Réalisez un reportage pendant 2 heures.
  • D'autres autorisations sont susceptibles d'être requises. Mais maintenant que vous y êtes.
  • Bien sûr partagez vos photos avez l'entreprise concernée s'ils en font la demande.

Je m'arrête là pour une semaine de photo. Mais vous pourriez continuer avec le voisin suivant et initier un projet ;)

Bonjour Madame, Bonjour Monsieur !

Les photos sont d'abord des objets physiques qui existent pour être partagés !

  • Placez vous au coin d'une rue passante, ou à un endroit qui est relativement fréquenté
  • Dites bonjour à tous ceux que vous croisez.
  • A ceux qui s'arrêtent ou à ceux qui vous intéressent le plus, proposez-leur de réaliser leur portrait.
  • Editez, développez, imprimez la meilleure photo de chacune des séances de portrait
  • Exactement 7 jours plus tard à la même heure, retournez au même endroit et tendez les photos à ceux qui vous reconnaissent. Et profitez-en pour réaliser de nouveaux portraits hein ;)

 

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Le paradoxe de la Place du Tertre

Il y a quelques années, alors que j'avais déjà décidé que je voulais faire de ma passion mon métier et tirer mes revenus de la photographie, j'ai dû reprendre un travail salarié pendant quelques mois. Je vivais ce retour au salariat comme un échec, même si très peu de personnes dans mon entourage connaissaient mon envie de changer de carrière professionnelle, je m'étais donné cette ambition et j'avais du mal à vivre avec cette décision que je prenais comme un abandon de mes rêves. En acceptant ce job, je me donnais en même temps le challenge de rester avec mon appareil photo en permanence sur moi et de publier une photo par jour prise le jour même sur les réseaux sociaux (également appelé par certains Projet 365). Je voulais seulement garder la photo dans ma vie et continuer à progresser.Pendant ces mois qui devaient s'avérer décisifs dans ce changement de carrière, mes week-ends étaient 100% consacrés à la photographie, essentiellement de la photo de rue à Paris. Mais après 4 mois j'arrivai dans une impasse créative. J'avais le sentiment de toujours passer aux mêmes endroits, de toujours faire les mêmes photo. Lors de mes sorties photo le samedi, je prenais à peu près toujours le même chemin partant de la mairie du 18ème arrondissement vers le sud en traversant la butte Montmartre, en passant par la place du tertre.Devant ce qui s'apparentait à une grande lassitude dans ma photographie, je ne savais plus comment progresser. Je pensais à l'un des lieux communs que l'on croise en matière de créativité ou d'innovation : "sortir de sa zone de confort". Cette phrase m'apparait bien souvent comme un poncif, une phrase facile que l'on dit sans trop y chercher de signifié. Mais tout de même j'explorais cette idée et me demandais : quel est l'endroit ou tu n'as vraiment pas envie de faire de photos ? La réponse était facile : la place du tertre. J'y passais deux fois en allant et en revenant, et mon boitier restait bien sage sur ma hanche ou dans mon sac. "Trop de touristes, aucun intérêt, on dirait Disneyland" voilà les pensées qui justifiaient mon absence de cliché.Je me dit alors : "et bien soit ! Allons-y. Sortons de cette zone de confort et allons voir cette place du tertre !" (je dis "nous" car je me soupçonne d'être plusieurs dans cette petite tête). Les deux heures que j'ai passé place du tertre restent gravées dans ma mémoire. Un grand souvenir, la découverte d'une humanité insoupçonnée, une joie immense que j'emporte avec moi jusqu'à ce jour où je vous le raconte. Et bien sûr des photos dont j'étais fier. Quelle claque émotionnelle.En allant place du tertre je décidais d'aller en son coeur, en plein centre, où les artistes vous vendent des toiles ou des caricatures. Je n'avais jamais pris le temps de regarder vraiment les tableaux, je découvrais de grands talents. Je discutais de l'histoire de l'un d'entre eux dont j'ai perdu le nom, né yougoslave et peintre de talent avec un atelier au nord de Paris, il avait une concession place du tertre pour arrondir les fins de mois de printemps car il ne venait là qu'aux beaux jours. En discutant j'assistais au balai des cafés et casse-croûtes qui s'échangeaient entre ceux qui vivaient ou travaillaient là. Il y avait des clans, des amitiés, et des touristes qui avaient autre chose à dire que "c'est par où la Basilique ?".La lumière de ce samedi de printemps était douce. Maintenant que je vis loin et dans un climat aux antipodes, je lui reconnais un air bleuté et une légère humidité pleine de fraîcheur. J'ai sû reproduire des moments d'une telle légèreté depuis, en allant vers les autres, en discutant, en photographiant, en posant des questions comme si je devais écrire la biographie de ceux que je rencontre, mais c'était je crois la vraie première fois. Cette après-midi restera un souvenir précieux.Le paradoxe ne serait pas complet si je n'avais perdu les photos de cette après-midi. Je me souviens ne les avoir jamais publiées car je voulais les travailler et raconter une histoire particulière ici, sur mon blog, ce que je ne fis jamais. Quand je retournais dans ma photothèque ce matin, je ne retrouvais qu'une seule photo gardée de ces rencontres. Impossible de me souvenir de la raison de cette perte, car j'ai bien les photos de cette période... C'est un mystère que je ne veux pas forcément résoudre.J'ai gardé le portrait de cette peintre, elle vivait sur la place dans une maison que lui avait légué son père. Elle m'avait emmené faire le tour de la place, m'avait présenté à ses amis et raconté son histoire autour d'un thé. J'espère qu'elle pourra un jour retrouver ce portrait et que nous pourrons encore partager la joie d'une après-midi de photo sous un soleil de printemps.

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La couleur de la lumière - le micro-guide de la balance des blancs

La lumière existe en différentes couleurs et depuis que les appareils photo n'ont plus de pellicule, il est possible de régler la manière dont le capteur numérique va interpréter ces couleurs : avec la balance des blancs.

Question d'ambiance

Techniquement sachez qu'il est possible de modifier la balance des blancs au moment du développement numérique si vous shootez en RAW, mais pas dans le cas d'un Jpeg.Le réglage de balance des blancs va vous permettre créativement d'accentuer la couleur de la lumière ou de l'atténuer pour la rendre plus neutre ou blanche. Cela aura un impact conséquent sur les couleurs de vos sujets si elles sont très présentes dans votre photo, d'une manière générale "l'ambiance" d'une photo eut être radicalement changée avec la balance des blancs.Tous les appareils photos présentent peu ou prou les mêmes pré-réglages de balance des blancs, chacun de ces pré-réglages représentent une interprétation particulière de la lumière appelée 'température' dont l'unité est le Kelvin. En accentuant la température d'une photo, vous obtiendrez des ambiances 'bleues' ou 'jaunes' qui auront tendance à rendre votre photo 'froide' ou 'chaude'.

Comment je (ne) règle (pas) mon appareil

Je vais être sincère avec vous, 99% du temps mon réglage de balance des blancs est automatique et je ne la corrige qu'en de rares circonstances au développement :

  • quand je souhaite donner une ambiance particulière

  • en portrait pour l'influence que cela peut avoir sur la couleur de peau

  • si la balance automatique est franchement ratée, ce qui est assez rare... et que je shoote en RAW, c'est généralement le cas

Il m'arrive d'utiliser un flash, notamment pendant des événements où je suis en commande, auquel cas je vais utiliser le pré-réglage de balance des blancs "Flash". Il m'est arrivé également d'utiliser une balance des blanc avec le pré-réglage "nuageux" sur un paysage au coucher du soleil, uniquement pour que la lumière apparaisse plus jaune ou orangée. Et sinon ? Je n'ai pas d'autre souvenir récent :)Cela fera sûrement crier des puristes de la technique, mais mon conseil est le suivant : restez en balance des blancs automatique, particulièrement si vous êtes débutant en photographie.Circulez, y'a rien à voir ici et beaucoup plus dehors.

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Il était un instant

Deux regards dans ma direction, deux autres qui se croisent et les deux derniers qui font semblant de ne pas me voir. Cette photo récente prise dans le quartier du Pelourinho à Salvador où je vis correspond au type de photo que je cherche à produire plus souvent. Si je vous en parle ici c'est pour essayer d'illustrer le concept d'instant décisif popularisé par Henri Cartier Bresson à une époque où la photographie opérait sa transition d'un manque flagrant de mobilité vers la compacité des appareils modernes.Le timing d'une photo est essentiel en photographie de rue, mais quand vous y réfléchissez bien il est essentiel dans tout type de photographie. Les instants qui sont susceptibles de vous percuter comme photographe sont par essence furtifs. L'expérience en photographie vous entraînera tout autant à les reconnaitre qu'à les voir passer sans pouvoir les reproduire et en ayant manqué de déclencher.En produisant des photos, vous reconnaitrez je l'espère cette tension qui vous pousse à chercher cet instant décisif, je la considère parfois comme une méditation, parfois comme une intention créative.Je n'aurais jamais pu voir cette photographie en exemple si je ne m'étais approché à ma manière, en cherchant ce type de composition. Pour le coup je n'étais clairement pas furtif, j'ai été repéré. Mais certaines photographies de rue présentent leur interaction avec le photographe et cela ne me pose pas forcément de problème, c'est un autre sujet mais je crois que le photographe est toujours l'un des sujets dans une photo.Ce moment qui passe si vite est une intuition, une envie, un espoir, c'est une tentative. Du fait du grand nombre de déchet en photographie de rue, c'est un moment rare qui raconte plus et mieux que ce que j'aurais pu choisir un dixième de seconde plus tard ou plus tôt. Apprendre à le rechercher, à le reconnaître, et donc souvent à le laisser filer, constitue une des prochaines étapes dans votre photographie. Si vous êtes arrivé jusqu'ici et que vous avez pratiqué la photographie, j'espère que vous ne vous considérez plus comme débutant(e).Gardez l'oeil ouvert et vous verrez ces instants apparaitre dans un cadre imaginaire si vous n'avez pas d'appareil photo, et si vous continuez à chercher la photographie qui vous ressemble, vous apprendrez à le chasser et à chérir la magie de l'instant décisif, que l'on pourrait tout aussi bien nommé un instant de grâce.

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Comment choisir son matériel photo

Parlons matos ! L'objectif de cet article sera de vous montrer que le matériel n'est pas forcément cher. Mon propos ne sera pas de vous vanter les mérites d'un boitier par rapport à un autre, d'une marque par rapport à une autre. J'ai mes préférences, bien sûr, et je les énoncerai. J'ai eu la chance de tester beaucoup de boitiers différents grâce à mon passé de blogueur et mon présent de photographe professionnel, mais je ne serai jamais exhaustif. Et puis je ne souhaite pas écrire sur le matériel, c'est le sujet le plus éculé sur les internets et d'autres le font très bien. Je pense notamment à Kai Wong, probablement le seul Youtuber (anglophone) que j'ai plaisir à voir tester du matériel.

Cependant si vous débutez en photographie la question du matériel se posera nécessairement.

Nous avons atteint un plafond en terme d'innovation sur le matériel

Ainsi j'aimerais commencez par vous dire que je pense que nous vivons une époque formidable du point de vue du matériel. Ce ne sera probablement pas l'avis de ceux qui travaillent pour des marques d'appareils photo ou qui en dépendent, le marché des appareils photo numériques continue de s'effondrer chaque année avec un coupable tout désigné : le smartphone et ses performances logicielles plus étonnantes chaque année.

Mais il me semble également que nous atteignons un plafond en terme d'innovation et de performance des appareils photos numériques. J'ai commencé à m'intéresser à la photographie avec le lancement du 5D Mark II de Canon qui semblait révolutionner beaucoup de choses, notamment dans la production de vidéo. Je me suis investi avec passion au moment du lancement des premiers hybrides "mirror-less" comme le Nex 5 de Sony, marque que je n'ai pas lâchée depuis.

Mais aussi loin que je regarde maintenant, quelque soit le segment d'appareil qui puisse vous intéresser : compact, expert, plein format ou haut de gamme... je ne vois plus d'innovation qui me fasse envie. Et cela a pour principale conséquence que à chaque lancement d'une nouvelle génération de boitier, la valeur de la version précédente baisse de manière conséquente, pour des boitiers que je trouve toujours excellents !

Seuls 2 éléments comptent pour la qualité d'une image : le capteur et l'optique

Car c'est ainsi et ce n'est pas prêt de changer, seuls 2 éléments rentrent réellement en ligne de compte sur la qualité intrinsèque d'une image :

  • le capteur

  • l'optique

Tout le reste, j'ai envie de vous dire que c'est de la littérature... ou plutôt du confort et de l'ergonomie. Ainsi en fonction de ce vous voudrez faire vous aurez besoin d'un design (par exemple compact en photographie de rue) ou de certaines fonctions (par exemple de la rafale pour des animaux sauvages). Mais si vous ne deviez analyser qu'une seule chose sur un boitier, c'est la qualité du capteur. Et je ne crois pas que quelqu'un puisse dire qu'un appareil photo présent actuellement sur le marché ait un mauvais capteur.

La dernière fois qu'une innovation majeure a été unanimement salué dans le domaine des capteurs, c'est lors de la sortie du Sony A7RII il y a plus de 4 ans. C'est d'ailleurs le dernier boitier que je me suis procuré, je n'ai pas ressenti le besoin d'évoluer depuis.Pour ce qui concerne mes optiques, j'ai eu besoin de versatilité pour pouvoir répondre à des demandes variées de clients : j'ai 3 zooms (12-24mm, 24-70mm, 70-200mm), tous de la marque Sigma et aucun n'a été acheté neuf. Je les adapte sur mon Sony A7 avec une bague d'adaptation Sigma MC11.

Pour être tout à fait exact sur ce choix, je pense qu'il est préférable de se passer d'un 12-24mm et d'un 24-70mm, et de les remplacer par un 16-35mm qui permet de répondre à plus de situations. Cependant je ne regrette pas mon 12-24mm, il m'a été très utile en architecture et pour Desert in New York. Simplement ce budget aurait pu être encore optimisé. Lorsque je ne suis pas en commande, je reste avec des optiques fixes : 28mm ou 40mm en photographie de rue, 85mm pour le portrait. Dit comme ça je trouve que ça fait quand même beaucoup... Je ne suis vraiment pas un bon exemple.

Procurez-vous la génération précédente de matériel

Mon propos est ici de vous dire de ne pas croire aux sirènes des fabricants de matériel : vous n'avez vraiment pas besoin de la dernière génération de matériel. Prenons quelques exemples.

Vous souhaitez le meilleur compact pour la photographie de rue ou de voyage ?

Il est facile d'observer les grands maîtres de la photographie d'après-guerre et d'avoir envie d'un Leica. Aujourd'hui vous pourrez probablement hésiter entre un Leica Q et un M10. Mais à moins de 4 500€ je ne crois pas qu'il y ait quelque chose de décent chez Leica. C'est un positionnement, maximum respect et bravo pour les meilleures optiques au monde. Mais si vous débutez, évidemment je déconseille.

Vous pourrez certainement vous rabattre sur un boitier formidable, appelé par certains le "Leica du pauvre" : le X100F de Fujifilm. La rolls des compacts experts vous allègera tout de même de 1200€.Et puis vous pourriez regarder de plus près un boitier encore plus compact, salué par quasiment toute sa communauté d'utilisateurs : le Ricoh GR. Il présente un capteur de taille APS-C (comme le Fuji X100) mais est encore plus compact. Le Ricoh GRIII qui est sorti cette année se trouve neuf à 900€. Mais la vraie bonne nouvelle avec la sortie du GRIII est la baisse de prix du Ricoh GRII qui se trouve à moins de 500€ ! et la sortie de la 3ème génération n'en fait pas un appareil de seconde zone, il est toujours aussi performant.

Alors bon je peux aussi comprendre que si vous voulez vous mettre à la photographie vous avez peut être envie d'en imposer un peu plus. Mais si vous voulez le meilleur ou pas loin, pas besoin de se saigner.

Vous souhaitez un boitier hybride plein format avec un large choix d'optique ?

L'offre est maintenant pléthorique depuis que Canon, Nikon et Panasonic sont rentrés sur ce marché. Et il y a quelques jours à peine le Sony A7 Mark II se trouvait à 690€ en promotion, une paille comparée aux dernières générations. Et je vous mets au défi de trouver un défaut critique à ce boitier.

Vous souhaitez un boitier APS-C pour gagner en focale ou en poids sur les optiques ?

Toujours en prenant la génération précédente, vous trouverez une qualité professionnelle avec le Fujifilm XT2 à 1090€, et le même capteur dans un boitier expert avec le XT20 à 890€.

En résumé je ne crois pas qu'investir dans du matériel photo soit limité aux dentistes et aux banquiers. Choisissez une génération antérieure et vous trouverez du matériel formidable pour un prix réduit et neuf.

Quelque soit les discours des promoteurs du dernier matériel qui se rémunèrent sur des liens d'affiliation, seuls deux éléments compte dans la qualité d'une image : le capteur et l'optique. Le reste, c'est de la cosmétique ou du confort.

Extrait du livre VA, lettre à un.e jeune photographe 

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7 poncifs sur la photographie

Certains conseils en photographie sont vus et revus. Creusons un peu et essayons de garder la substance de ces poncifs de la photographie.

1. Ce n'est pas le matériel qui compte, c'est le photographe

C'est très vrai, l'appareil photo n'est qu'un outil créatif, je crois le répéter à longueur de temps. Vous devez reconnaître que si vous pratiquez la photographie, vous pratiquez une forme d'art visuel et le ou la peintre sera toujours plus important que le pinceau, le ou la chef(fe) sera toujours plus important que sa casserole.

Mais si vous débutez en photographie, pendant un certain temps l'appareil sera tout pour vous, car vous aurez tellement à en apprendre. Bon j'ai essayé dans ce livre de vous montrer que ce n'était pas si compliqué, mais il y a tellement de détails techniques ou de pratiques avancées que je n'ai pas abordé ! Il est facile avec le temps de rester enfermé dans la technique et de ne jamais pousser les limites de son art. Je suis le premier concerné, croyez-bien que j'en ai conscience. Et je crois que tout photographe qui avance dans sa pratique comprend vite que l'appareil ne l'aidera pas à réaliser de meilleures photos, qu'il en est le seul responsable.

Internet est tellement rempli d'analyses techniques, les fabricants nous vantent tellement les innovations de leur dernier boitier qu'il peut devenir facile de s'y complaire et d'oublier ce qui constitue le meilleur outil d'un photographe : ses chaussures. Choisissez des chaussures confortables, qui vous permettront de marcher longtemps et loin. Vous verrez plus, vous chercherez plus, vous vous trouverez mieux.

Enfin force est de reconnaître que pour réaliser certains types de photographie, un matériel sera meilleur qu'un autre. En photographie de rue, vous apprécierez la discrétion et la légèreté, mais pour le paysage vous investirez probablement dans un trépied et un porte-filtre, ainsi que dans une optique grand angle, si le sport ou les oiseaux sont vos sujets principaux vous aurez besoin d'une bonne rafale et d'un téléobjectif, peut-être même que vous préférerez avoir un capteur APS-C qui multipliera encore un peu plus votre focale, si vous voulez être portraitiste vous voudrez probablement tester un bon 85mm, juste pour voir. L'appareil photo ne fait pas tout, mais selon le photographe que vous voulez être, vous aurez besoin de mieux comprendre le matériel, c'est bien naturel.

2. Le meilleur appareil est celui que vous avez avec vous

Cette phrase m'a marqué quand j'ai débuté la photographie de rue. A chaque fois que je n'avais pas un appareil avec moi j'étais frustré de ne pouvoir pratiquer. Ici encore cette phrase pourrait vous faire penser que le meilleur matériel photographique est forcément léger et tout le temps avec vous. Encore une fois cette phrase a du sens pour un ou une débutant(e), c'est un bon moyen d'inciter à progresser que de vous dire d'avoir toujours un appareil avec vous.

Et c'est aussi un rappel que vous n'avez probablement pas besoin de changer d'appareil photo pour pouvoir faire ce que vous voulez, quasiment tous les boitiers actuels permettent de pratiquer tous les genres photographiques, ne vous arrêtez pas à cause de votre matériel.

Mais cela ne veut pas dire que le meilleur appareil photo est votre téléphone. Certains photographes sont brillants avec leur téléphone, mais ceux que vous aimez et suivez sur Instagram ? Ils n'utilisent probablement pas leur téléphone pour produire leurs photos.

3. Si votre photo n'est pas assez bonne, c'est que vous n'êtes pas assez près

Cette fameuse phrase est attribuée Robert Capa, que j'espère il n'est pas nécessaire de présenter longuement, étant l'un des photographes de presse et de guerre les plus renommés. Cette phrase est devenue un poncif qui ne s'applique malheureusement pas à tout. C'est souvent vrai en photographie de rue, en reportage ou en photographie documentaire, c'était certainement très vrai pour Capa et le métier qu'il pratiquait. Pour le reste, ça dépend.

Ce conseil est à retenir si vous souhaitez explorer la photographie de voyage ou la photographie de rue, car plus souvent que le contraire un photographe débutant aura peur de s'approcher. Et cette phrase est un très bon mantra si vous débutez en photographie.

4. Zoomez avec les pieds

Encore une fois c'est un conseil que je suis susceptible de donner en photographie de rue, je pense qu'il est préférable d'apprendre à voir avec une seule focale plutôt que de se perdre dans les limbes du zoom. Ainsi le seul moyen de zoomer serait avec les pieds, en s'approchant.

Mais ce serait écarter les innombrables photos que je n'aurais jamais pu faire sans zoom, notamment en voyage quand le sujet que vous avez vu est simplement trop loin, ou quand il est tout bonnement impossible de s'avancer.

5. Evitez la mi journée, préférez l'heure d'or ou l'heure bleue

J'ai rarement vu un conseil plus stupide. Oui l'heure qui précède le coucher du soleil ou qui succède le lever sera plus douce, plus équilibrée, peut être plus agréable à l'oeil pour le portrait ou le paysage. Mais cela voudrait dire de simplement s'arrêter 10 heures par jour ? Non, la lumière de la mi journée est plus dure et plus contrastée et je trouve cela formidable. Vous devrez simplement adapter votre pratique pour la maîtriser et réaliser des photos différentes, mais s'il vous plait ne vous contraignez pas à cette idiotie de croire que la lumière est vraiment meilleure à certains moments. Elle est différente et puis c'est tout.

L'heure bleue serait le seul moment valable pour le paysage urbain ? Je la trouve classique, vue et revue. Et je suis bien heureux d'avoir choisi pour mes villes désertes le moment où il n'y avait personne, pas en fonction d'une heure bleue violette ou rouge.

Dans tous mes workshops, j'aime rappeler qu'il n'y a pas de mauvaise météo, il n'y a que ce que vous en faites.

6. La règle des tiers

Oui bon je sais je vous en ai parlé en introduction de mes 10 règles de composition. Mais je vais renommer cet article. Ce ne sont pas des règles, ce sont des outils qui doivent vous aider à progresser en composition.

Vous noterez d'ailleurs que dans mon article sur la composition la règle des tiers est parfois incompatible avec une autre règle, comme la symétrie. Vous remarquerez également que certainement photos combinent plusieurs règles de composition.

S'il y a bien un poncif sur la composition, c'est la règle des tiers. Mais c'est utile pour un débutant de comprendre qu'il est souvent préférable de ne pas mettre son sujet au centre. C'est aussi une règle qui doit vous apprendre à regarder votre cadre jusque dans les coins. Mais passé l'initiation à la photographie, la règle des tiers devient presque accessoire.

Encore une fois, c'est un outil et pas une règle.

7. Achetez des livres, pas du matériel

Vous voyez où je veux en venir ? Je me répète mais sans matériel, pas de photo. C'est certainement un excellent conseil de vous dire de vous constituer une bibliothèque de livres-photo, c'est un bon moyen de progresser que d'analyser le travail de grands photographes.

Mais une optique va vous couter un minimum de 400€, et si vous me disiez de remplacer les 4 optiques que j'utilise le plus par + de 2000€ de livres-photo, je vous rirais au nez.

Achetez des livres pour progresser, oui c'est sûr. Mais achetez aussi des expériences, des voyages, et un peu de matos pour prendre des photos.

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Arrêtez de regarder et commencez à voir

Vous commencez à maitriser votre appareil et êtes plus familier avec les aspects techniques de la photographie. Vous avez une meilleure idée de comment vous pouvez utiliser les techniques de composition dans votre photographie. Vous êtes plus à l'aise avec la lumière et ses spécificités et vous connaissez quelques bases sur les optiques.J'espère que vous avez progressé dans ces différentes étapes en pratiquant autant que vous le pouvez. Ce livre n'est pas une invitation à lire mais une invitation à photographier, alors photographiez ! Commencez à faire des erreurs, à tomber dans les pièges que nous avons tous rencontré. Vous allez commencer à vous demander comment vous pourriez améliorer chaque photo que vous avez prise. Et si vous passez plus de temps à penser à votre composition qu'à votre appareil photo, j'espère que vous vous surprendrez à "voir" des photos alors que vous n'êtes pas du tout à cette activité.La technique ne vous emmènera que jusqu'à un certain point. Si vous voulez réaliser de meilleures photos, vous devez arrêter d'observer simplement ce qui vous entoure et commencer à VOIR les photos qui existent comme potentiel.Par bonheur vous en verrez partout, tout le temps. Un détail peut sembler anodin pour n'importe qui, il peut avoir du sens pour une photo, pour une histoire que vous voudrez raconter. En voyant des photos partout, vous réaliserez que ce qui fera le ou la photographe, ce sont justement ces choix, ce qu'il ou elle a choisi de capturer et de montrer. Vous serez surpris de constater que l'endroit le plus anodin peut être sublimé, que la beauté formelle est le meilleur moyen d'effectivement passer un message.Vous ne pourrez plus regarder passivement. Vous verrez, littéralement. Une lumière, un contraste, un regard, une histoire à laquelle vous serez sensible. Votre appareil photo lui ne voit pas, il interprète des informations et les transforme en pixels, il retranscrit. Et grâce à lui vous pourrez voir, montrer et raconter. Il vous faudra également apprendre cette auto-critique difficile qui vous fera reconnaître une photo meilleure qu'une autre dans votre approche.Cette nuance essentielle, cette différence radicale entre regarder et voir vous amènera à observer qu'un ou une photographe n'est pas un capteur numérique, il ou elle ne prend pas des informations pour les retranscrire. Vous devez reconnaître que vous n'êtes pas un appareil photo, vous devez constater que vous êtes un ou une artiste - un ou une artiste visuel, qui utilise la photographie et différents outils techniques pour s'exprimer. Vous utilisez des sensations et une vision du monde qui vous entoure. Voir est quelque chose de très personnel, de profondément ancré, vous ne trouverez pas deux manières identiques de voir.Quelque soit le niveau auquel vous croyez être ou auquel vous aspirez, cela ne changera rien à ce constat : VOUS êtes un ou une artiste.

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JPEG vs RAW - Le mini-guide du développement numérique

Nous voici dans la phase la plus délicate pour cette série d'articles (et le livre dans lequel ils seront regroupés) : le développement.

C'est une partie importante pour le temps que nous sommes susceptibles d'y passer en photographie. J'ai pour habitude de dire que le temps de développement et de traitement d'une série de photos est équivalent au temps de prise de vue. Mais c'est probablement encore plus pour un débutant, qui a une phase d'apprentissage importante sur la partie logicielle de ce processus. Parce que je n'ai jamais utilisé d'autre logiciel qu'Adobe Lightroom, toutes les captures seront ici issues de Lightroom. Mais tous les principes expliqués ici seront valables avec les nombreux autres logiciels disponibles sur le marché.

Est-il obligatoire de 'shooter en RAW' ?

Si vous avez compris cette phrase c'est que vous n'êtes pas vraiment débutant :)

Je me dois d'expliquer ici la différence entre les 2 types de fichiers que vous serez à choisir sur votre appareil photo numérique : les fichiers .jpeg (ou .jpg) et les fichiers dits "RAW" (pour Brut en anglais).

Ce qu'il me semble important de savoir est qu'un fichier .jpeg sera un fichier avec une compression logicielle, ce qui aura 2 conséquences :

  • les fichiers seront plus 'légers', vous pourrez donc prendre plus de clichés sur une même carte mémoire, et vous pourrez les transmettre plus rapidement

  • les fichiers auront déjà intégré un 'profil colorimétrique' que vous pouvez changer sur votre boitier

Du côté du fichier RAW, il me semble important de savoir quand on débute que ce fichier est celui qui contient le plus d'information, là aussi avec 2 conséquences majeures :

  • les fichiers auront nettement plus d'information, ils prendront une place conséquente dépendant de la résolution du capteur de votre boitier. Sans rentrer dans les détails de la compression Jpeg, on évalue généralement la quantité d'information compressée à 40% du fichier 'RAW'.

  • 40% c'est conséquent, en shootant en RAW vous aurez beaucoup plus de latitude au développement numérique. Cette latitude dépendra de la photo car la compression Jpeg sera effective avant tout sur les valeurs d'exposition 'sombres'. Mais sur le principe en shootant en RAW vous aurez aussi le loisir de mieux 'récupérer' des ombres si c'est nécessaire à votre développement.

J'ai bien essayé ici de ne pas dévaloriser une méthode par rapport à l'autre. Je trouve intéressant, notamment lorsque l'on débute, de shooter en JPEG pour ne pas avoir à trop se préoccuper du développement et pour être plus attentif à son exposition, puisque vous pourrez moins la corriger si elle est ratée. Shooter en JPEG présente également l'avantage d'avoir une cohérence graphique sur une série de photo qui auront toutes le même profil colorimétrique (vous pouvez l'ajuster selon votre goût).

Enfin pour terminer sur ce sujet (franchement barbant), je remarque souvent lors des voyages photos que j'accompagne que beaucoup de photographes ne savent pas qu'un fichier RAW n'intègre pas de profil colorimétrique. C'est pour cette raison que l'application d'un profil colorimétrique est pour moi une des étapes les plus importantes du développement. C'est aussi pour cette raison que les fichiers RAW peuvent paraître "fades" lors de l'importation dans votre bibliothèque.

Développement numérique en 5 étapes

Cette séquence de développement n'est bien sûr absolument pas une règle ou une méthode rigide, c'est simplement celle que j'ai affiné au fil du temps et je la partage simplement pour en expliquer quelques principes et essayer de faire gagner un peu de temps à un(e) débutant(e) :

1. Appliquer un profil colorimétrique

Comme je vous le disais, cette étape est souvent ignorée par des photographes débutants, c'est celle que j'applique en premier. Depuis quelques versions de Lightroom, l'explorateurs de profils colorimétrique a été remonté par Adobe dans le module de Développement, et je ne peux que me réjouir de cette décision de changement de l'ergonomie.

Dans l'explorateur de profils, vous trouverez différents profils colorimétriques d'Adobe classés par style. Notez que vous trouverez également l'ensemble des profils colorimétriques de base issus de votre appareil photo si vous shootez en RAW. En effet l'ensemble des profils est inclut dans chaque fichier !

Bien sûr si vous shootez en Jpeg, vous n'aurez pas la possibilité de le modifier.

En pratique je passe rarement dans le module de développement dès le début d'une session de développement. J'applique un pré-réglage ou 'preset' à toute une sélection de photo depuis le module 'Bibliothèque' afin de gagner du temps, ce pré-réglage contient un profil colorimétrique. Généralement j'applique ce pré-réglage à la 2ème étape de mon processus d'édition, à toutes les photos que j'ai noté 1* (voir l'article 'Mini-guide de l'édition').

2. Développement rapide

L'intérêt principal d'un logiciel comme Lightroom est pour moi de pouvoir appliquer les mêmes réglages en lot, à un groupe de photographies. La plupart du temps je reste dans le module 'Bibliothèque' où j'édite mes séries de photos pour éviter de répéter les mêmes actions fastidieuses sur toutes les photos.

Cela commence par les réglages basiques d'exposition où j'utilise parfois le bouton de Lightroom 'Exposition automatique'. Attention je ne voudrais pas suggérer l'utilisation de cette fonction de manière systématique, très souvent je n'en ai pas besoin mais cela peut aussi donner un bon point de départ de manière très rapide. Pour ce bouton 'exposition auto' je remarque notamment en paysage une tendance à surexposer, mais il m'est très facile de corriger cela, toujours depuis le module 'Bibliothèque' qui donne accès à des modifications basiques de l'exposition.

Toujours pour essayer d'être le plus efficace possible dans mon développement, je vais utiliser depuis le module bibliothèque la synchronisation de réglages sur plusieurs photos. Le procédé est le suivant j'applique un réglage individuel sur une photo, puis dans le module 'Bibliothèque' je la sélectionne en premier puis je sélectionne toutes les photos que je souhaite synchroniser. Cette fonction est très utile pour appliquer des réglages d'exposition identiques sur une série de photos prises au même moment / endroit avec les mêmes réglages. Je l'utilise également notamment pour appliquer des profils de corrections d'optiques, mais cela peut être utile pour tout !

La touche de raccourci "Pomme-Shift S" ou "Alt-Shift S" sur PC est celle que j'utilise le plus dans cette première étape.

3. Recadrage

J'aimerais vous dire que je ne recadre jamais mes photos mais ce serait mentir. J'apprécie l'approche puriste des grands maîtres, mais je n'ai pas de problème fondamental à rogner une image, notamment en photographie de rue lorsqu'une scène passe très vite, si ce n'est pas dans de trop grandes proportions (dont je vous laisserai seul juge :) ). La touche de raccourci pour passer directement à l'outil de recadrage est la lettre 'R' sur votre clavier.

4. Correction de défauts

Mon étape suivante est d'ajuster les petits défauts d'une photo. Cela arrive notamment en paysage si j'ai quelques poussières qui trainent sur mon optique. Mais cela peut aussi concerner quelque détails sur une photo que je juge inutiles ou qui viennent en perturber sa lecture. Je ne suis pas photo-journaliste et n'ai pas de problème de déontologie de ce côté là, j'essaye de rendre une photo la meilleure possible.

L'outil de correction des défauts est accessible avec la touche 'Q' de votre clavier.

5. Ajustement de l'exposition et des couleurs

Je termine enfin par l'ajustement précis de l'exposition. L'outil principal à cette étape est l'histogramme qui reste affiché en haut du module d'exposition. Il serait impossible ici de décrire un procédé qui s'applique à toutes les photos, cela dépendra évidemment du style de développement que vous souhaiterez explorer.

Il me semble intéressant ici de noter que l'histogramme d'une photo n'est qu'un outil que vous pourrez aussi utiliser créativement selon ce que vous souhaitez explorer. L'histogramme est en réalité la manière dont votre boitier ou votre logiciel comprend la photo qui se présente à lui : uniquement avec des pixels. Votre appareil photo ou votre logiciel ne sait pas ce que vous photographiez, c'est pour cette raison que les modes automatiques (de votre appareil ou de votre logiciel de développement) sont si souvent à côté de la plaque, ils appliquent toujours le même principe en essayant d'étirer votre histogramme pour qu'il soit équilibré. Je ne connais pas de bon ou de mauvais histogramme, c'est un outil, une aide pour exposer votre photo ou pour faciliter votre développement.

Avant - Après

Je sais bien qu'il y aurait des millions de choses à dire ou préciser sur le développement ou sur Lightroom. J'ai essayé ici de donner quelques clés pour aider un débutant en photographie, mais je vous renvoie à la littérature pléthorique ou tutoriels (pour nombre d'entre eux gratuits sur le site d'Adobe ou sur Youtube) qui existent sur ces sujets si vous souhaitez approfondir.

Voici le avant-après pour cette photo pris dans le quartier du Pelourinho la semaine dernière :

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