Le temps d’écrire
Les apparences sont probablement trompeuses, mais j’ai régulièrement le syndrome de la page blanche. Je ne sais pas à propos de quoi écrire. Je rentre de New York, épuisé par les kilomètres et l’intensité de cette ville miraculeuse, et quand je me projette dans l’avenir j’imagine bêtement comment je pourrais avoir une chaîne Youtube. Et puis, comme toujours, je reviens à l’écrit. Je reviens à cet amour infini pour le verbe et le flux de conscience qui commence dès que je prends le clavier et me laisse porter par une intuition.
Le temps qui se présente devant moi ne sera pas consacré à des films, parce que j’aime trop écrire. Je repense à ce que je disais à une amie quand je commençais à dire qu’un jour je voudrais être photographe : “je veux faire des photos et écrire”. Dix ans plus tard, alors que je m’apprête à montrer enfin mon quatrième livre photo, produit en même temps que le troisième, je pense déjà au suivant.
Je croyais depuis l’année dernière et la reprise de mes visites à Paris que ce nouveau projet serait à propos des Parisiens. Mais comme je l’explique souvent aux photographes que j’accompagne, tout sujet peut être traité en bas de chez soi. Le problème avec les voyageurs, c’est parfois de bien comprendre où est chez soi. Pour moi, c’est maintenant un peu plus simple, chez moi c’est ma famille : Fernanda, Luna et Tom.
Ce projet, je l’ai en moi depuis un an et je veux commencer à l’écrire. En vérité, je veux encore plus l’aboutir, parce que je sais déjà ce que je veux dire, même si je crois que ça ne ressemblera à rien que je n’aie déjà vu. C’est inconnu et c’est ce qui rend ce projet tout autant excitant que vertigineux, car j’aimerais qu’il soit un peu plus vu que si je le produisais seul. Je vais donc partir en quête d’un éditeur.
Si vous voulez mener un projet, vous feriez probablement mieux de ne pas en parler avant qu’il ne soit abouti. C’est pour cela que j’en donne peu de détails. Mais si je vous dis ça, c’est un peu aussi pour me forcer à la tâche. En annonçant l’idée, je veux me donner une perspective, voire une date limite. Je veux me lancer, et ne plus regarder en arrière. Je veux écrire, enfin.
5 leçons de photographie avec Bieke Depoorter
Originaire de Courtrai, en Belgique, Bieke Depoorter est née en 1986. La photographe a obtenu un master en photographie à l'Académie royale des beaux-arts de Gand en 2009. À 25 ans, elle a été nommée pour rejoindre L’agence Magnum, dont elle est devenue membre à part entière en 2016.
Ses premières photographies sont le résultat d'une approche unique : elle rencontre des gens par hasard et arrive à photographier dans leurs maisons et à capter leur intimité. Bieke Depoorter capture des moments indescriptibles, fragiles et intenses.
1- Proximité et authenticité
Le secret de Bieke Depoorter : l’authenticité. Comment y arriver ? La proximité, l’intimité avec ses sujets… Bieke nous montre que s’immiscer dans le quotidien des gens permet de révéler qui ils sont vraiment. Chez soi, on ne porte plus de masques, il n’y a plus de prétentions, de paraître, nous pouvons être qui nous sommes réellement.
C’est probablement une démarche qui peut faire le plus peur pour des photographes, mais tout comme je vous conseillerai en photographie de rue de commencer à aller parler à des inconnus si vous voulez progresser, si vous êtes intéressés par la photographie documentaire, commencez par frapper à la porte de vos voisins et proposez leur une séance de photos chez eux ou un reportage dans leur activité professionnelle. Vous serez surpris de la facilité avec laquelle les gens acceptent.
C’est exactement la démarche que j’ai proposé à Élodie Sauvage Pieri dans mon groupe de Mentorat l’année dernière, alors que la France était sous couvre-feu, et le résultat fut remarquable.
2- Gagner la confiance de ses sujets
Toute photographie en dit autant sur le ou la photographe que sur le sujet qui est montré. En portrait, le résultat est la conséquence directe de la relation que vous allez établir avec les personnes que vous rencontrerez. Dans la grande majorité des cas, vous ne connaîtrez pas les personnes avant de commencer à les photographier.
Personnellement, pour établir la confiance, je demande simplement quelle est l’histoire de la personne, qu’est-ce qui l’a amené ici ou là, et je suis très attentif à la réponse. Je crois que la confiance se gagne par la preuve, en étant sincèrement intéressé par la personne et curieux de qui elle est. Pour bien voir, il faut parfois savoir écouter.
3- La réalité est plus lumineuse une fois la nuit tombée
Rien ne remplace la nuit, d’abord pour tout ce qu’elle contient de symbolique, il va sans dire que c’est la nuit qui révèle notre part d’ombre. La lumière ne serait rien sans l’ombre qu’elle crée, de la même manière la nuit sublime toutes les sources de lumière et montre la face cachée de l’humanité. Ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle le “monde de la nuit”.
4- Photographier ses émotions
Voici le meilleur conseil : écouter ses envies, ses émotions. Cela permet d’affirmer son style et de faire ressortir sa personnalité. La vie doit vous inspirer, autant que les grands maîtres de la photographie. L’inspiration vient d’abord de vous-même, car la photographie est une pratique essentiellement intuitive.
(Même si je vous conseillerai toujours de connaître l’histoire de la photographie et ceux qui sont passés avant vous ;) )
5- Considérer les gens comme des acteurs et non des sujets
Depuis quelques années, je parle toujours des personnes dans mes photographies comme étant des personnages. Quel est le langage du corps ? Qu’est-ce qu’ils ont l’air de faire ou de penser ? Même si ce n’est pas conforme à la réalité de ce que je connais du sujet ou de la scène, la seule chose qui importe est ce que montre la photo et ce que ressent le spectateur en étant mis face à ce personnage.
Prendre chaque sujet comme un personnage ouvre également des possibilités infinies dans les techniques narratives pour construire une série de photographies ou un projet.
Le site de Bieke Depoorter - et sur Instagram
L’homme orchestre
Un photographe professionnel est un homme orchestre. Quelle que soit sa spécialité, les genres pratiqués ou les clients qui lui font confiance. C’est vrai en 2021, mais c’était certainement le cas depuis les débuts de la photographie, en tout cas pour des photographes indépendants.
Il faut être capable de mener une activité d’entreprise seul en gardant une démarche personnelle, puisque elle seule permet de se différencier, ou simplement d’avoir des photographies à montrer.
Depuis 10 ans, les métiers que j’ai occupé sont nombreux :
Photographe de voyage, de rue, de villes, d’événements, de voitures, de mariages, culinaire, portraitiste, journaliste et combien d’autres…
Écrivain, journaliste, blogueur quand j’ai besoin d’écrire pour moi ou pour les autres.
Community Manager, ce mot fourre-tout pour dire qu’il faut savoir créer un site web et développer une présence, voire une communauté sur les réseaux 365 jours par an.
Entrepreneur, commercial, comptable, mais surtout stratège ou marketeur (quel horrible mot) quand il s’agit d’atteindre des objectifs de chiffre d’affaires.
Et aussi, travailler avec des galeries, monter des expos, développer des projets avec des startups (Artpoint) ou des grosses machines (Yellow Korner), éditer des livres ou des magazines.
Guide de voyage dans une dizaine de pays.
Enseigner, écrire des cours, développer la créativité chez d’autres et accompagner le développement personnel en photographie, amateure ou professionnelle.
Jamais je n’aurais imaginé être capable de faire tout cela, JAMAIS. Tout ce que je voulais, c’était faire des photos et espérer que certains soient assez fous pour m’en commander. J’ai réalisé très tard dans ma vie que c’était tout ce que je voulais faire, et rien d’autre. Dix ans plus tard, j’ai toujours mon appareil à portée de main et le même plaisir d’essayer de voir des belles choses ou de les montrer quand une photo est réussie.
Ce que cette liste ne dit pas, c’est d’abord que ces métiers ne se font pas tous en même temps, dans la même année ce serait impossible. Ensuite, ce qu’elle ne montre pas c’est l’aide que j’ai pu trouver chez d’autres photographes. Dans des livres souvent, et dans des discussions parfois. J’ai eu la chance de passer du temps avec beaucoup de photographes qui ont réussi, grâce à eux je me suis forgé des convictions et ai trouvé des méthodes que j’ai pu adapter à ma pratique ou à mes besoins.
On a toujours besoin d’un plus grand que soi, c’est ce que décrit très bien Robert Greene dans le livre “Mastery - Atteindre l’excellence” : pour progresser, il faut absolument s’appuyer sur d’autres. Encore cette année, j’ai choisi d’être aidé pour le projet développé pendant ma résidence artistique à Port-Fréjus, pour son écriture et pour l’édition du livre qui sortira l’année prochaine.
L’année dernière, je profitais du premier confinement pour demander une lecture de portfolio à un photographe que j’admire absolument. Cette lecture de portfolio m’a coûté cher, mais je n’en regrette pas un seul centime, elle a été l’occasion d’une prise de conscience qui m’a fait franchir une nouvelle étape.
Et depuis cette année, j’ai la chance d’avoir pu me mettre dans la peau de celui qui enseigne, de celui qui aide d’autres photographes à progresser. Quand je proposais mon programme de Mentorat, j’allais dans l’inconnu. Je n’avais jamais eu ce rôle et j’espérais que tout le monde puisse progresser de manière notable. Je peux maintenant dire que tous les participants ont progressé, d’abord dans leur photographie. Pour certains, leur carrière à décollé grâce aux projets développés pendant ce mentorat.
Je sais que ce programme peut faire une différence.
Et si vous êtes curieux, vous pouvez commencer par une lecture de votre portfolio.
Le syndrome du bâtard
Il existe des amitiés qui transcendent la distance et la séparation, et je suis heureux de vous parler aujourd’hui de mon amie Marie. Aujourd’hui sort en librairie le livre qui est autant un récit qu’un essai intitulé Le Syndrome du Bâtard.
Dans une vie qui me semble si lointaine aujourd’hui, je rencontrai Marie dans un dîner où j’étais accompagné de mon nouveau grand amour : mon appareil photo. Marie est une des premières personnes que j’ai photographié “en essayant de faire des photos”, c’est à dire en prenant un appareil photo avec moi toute une soirée et en consacrant effectivement du temps à capturer des instants sans demander un sourire convenu.
Marie riait fort, elle était joyeuse, et quand je photographie je regarde mais surtout j’écoute. Photographier me permet de me mettre dans le trou de la serrure d’une pièce, je suis celui qui fait des photos qu’on oublie assez vite, alors j’entends tout et j’essaye d’attraper le rythme des voix. Marie avait ces cheveux blonds qu’on a besoin de ne voir qu’une fois pour s’en souvenir. Ils attirent d’autant plus l’oeil quand ils sont haut perchés. Marie était belle, alors je prenais des photos de la jolie blonde au bout de la pièce.
Quand nous nous sommes parlés, je crois que nous avons connecté instantanément. Rencontrer une amie, c’est rencontrer une âme complice. Les quatre cents coups, elle les avait déjà faits. Je m’apprêtais à les faire en quittant tout, en vivant de fêtes, de blogs et de voyages, alors nous pouvions bien rire de toutes nos futilités, passées et à venir.
Quand nous avons parlé sérieusement, je découvrais que chacun d’entre nous n’avait aucune autre limite que notre volonté. Grâce à mes patrons qui m’ouvraient les yeux et mes lectures qui m’ouvraient la voie, je me rendais compte que je pourrai vraiment faire ce que je voudrais si j’en avais l’absolue volonté. Et parce que je ne suis pas avare en prétentions, je pensais que tout le monde pouvait faire pareil. Marie me disait qu’elle aimait lire par dessus tout et qu’elle aimerait écrire : “ouvre un blog”.
En matière de projets, Marie a tout ce qui me manque : la patience de l’excellence. Quand je commence dix projets pour en terminer un, Marie met dix ans pour en rendre un seul parfait. J’exagère à peine. Car pour écrire un livre, un seul, le chemin est vertigineux, périlleux et tellement long. Marie pèse chaque mot, cuisine le moindre paragraphe, elle assemble d'allers et retours et dresse un titre comme personne. Je suis convaincu que ce livre est le début d’une carrière d’autrice sublime.
Parce que nous avons été proches tout le long de ce chemin, je sais toute la difficulté de sortir de soi cette histoire, tellement dure dans ses prémices mais tellement belle dans son déroulement. Marie a lutté chaque phrase et chaque virgule, parce que cette histoire est une tragédie qui nous concerne tous en nous renvoyant à notre identité : notre filiation, notre rapport à nos parents. Même si ces sujets ne remplissaient déjà les salles d’attente des psychanalystes, ce serait facile à comprendre : ce que nos parents font de nous, ce que nos parents disent et taisent nous définissent. Le secret tue, malgré tout.
Le livre Le syndrome du bâtard est l’aboutissement de ce chemin pris par Marie pour découvrir son histoire et révéler les conséquences de ces secrets sur les enfants illégitimes ou naturels.
Quelle drôle d’expression. Qui donc aurait le droit de déclarer un enfant illégitime ? Qui pourrait croire qu’un enfant ne soit pas naturel, pour avoir besoin de le préciser ?
Aller lire le livre de Marie, c’est tout ce que je trouve naturel dans cette histoire.
> cliquez ici pour commander le livre chez les libraires indépendants.
Les photos à suivre sont de Svend Andersen, elles participent au projet Bande de Bâtard qui recueille des témoignages d’enfants illégitimes.
3 étapes pour définir un projet photo
Déterminer ou choisir un projet photo sur lequel travailler sur une longue période de temps peut être l’une des étapes les plus difficiles dans le parcours d’un photographe. Cet article est destiné aux photographes qui essayent de donner un sens a leur photographie, à ceux qui souhaitent explorer la photographie artistique, journalistique ou documentaire. Quel que soit votre avancée dans votre pratique, vous avez certainement compris que la photographie ne s’expérimente presque jamais avec des photos uniques, individuelles, sans aucune connection entre elles.
Que ce soit pour un client, une histoire, un livre ou une exposition, il est toujours nécessaire de penser la séquence de photographies, de construire à partir d’une idée ou d’un principe qui va permettre au spectateur de comprendre le message que vous portez. L’ensemble de photographies qui composent cette séquence, je l’appelle projet, mais ce pourrait être un sujet pour un média ou une exposition pour une galerie.
Pour avancer dans votre photographie, le mieux est de définir vous-même les sujets ou les projets personnels sur lesquels vous souhaitez travailler. Ce sera toujours plus satisfaisant de réaliser des photos que vous aimez voir, et qui portent le message que vous aimeriez transmettre. J’essaye ici de suivre un processus simple en trois étapes pour explorer vos options, vous devriez ainsi avoir un outil que vous pouvez immédiatement utiliser pour vous aider à avancer de manière significative.
Je vous propose trois étapes pour découvrir un projet photo personnel :
Choisir une idée
Créer un principe narratif
Aligner vos photos sur ce principe narratif
Choisissez une idée
À chaque instant, autour de moi, j’ai une possibilité infinie de photographies. C’est pour cela que toute photographie, que l’on veuille ou non, en dit autant sur le photographe que sur le sujet photographié. Selon le même principe, les possibilités de projet photo sont par essence infinies. De plus, il est à peu près certain que chaque sujet que vous choisissez a déjà été traité par des photographes, des auteurs ou des artistes avant vous.
Norman Vincent Peale peut nous éclairer sur le pouvoir du choix :
« Le plus grand pouvoir que nous ayons est le pouvoir de choisir. C'est un fait, si vous avez toujours tâtonné sous le poids des difficultés, vous pouvez choisir d'être joyeux, à la place. Vous pouvez décider de choisir le bonheur. Si vous avez tendance à avoir peur, vous pouvez la surmonter en choisissant d'avoir du courage. Le chemin et la qualité de la vie de chacun sont déterminées par les choix qu’il fera ».
Si je vous cite ici l’auteur le plus connu sur la pensée positive, c’est pour essayer de lever le dernier doute dans votre esprit : choisissez d’abord un projet ou un sujet qui vous plaît à vous. Ne vous laissez pas submerger par ceux qui aurait pu mieux traiter le sujet, ils ont eux-même été inspiré par d’autres artistes ou d’autres histoires avant eux. Choisissez l’idée que vous voulez défendre, le sujet que vous voudriez faire connaître. Choisissez ce qui vous passionne et apprenez à savoir pourquoi. Si vous ne savez pas pourquoi un projet vous intéresse, comment voulez-vous que cela concerne quelqu’un d’autre ?
En faisant un choix, vous vous donnez une direction. Une fois que vous déterminez une direction conforme à vos valeurs, vous commencerez à voir les photos qui y correspondent un peu partout. Si vous poursuivez dans cette direction avec sincérité, il n'y a aucune raison pour que vous ne puissiez pas accomplir votre objectif.
Pour déterminer cette direction, le sujet ou le projet que vous pouvez choisir, vous devez comprendre la différence entre ce que vous photographiez et le message d’une photo. Il est nécessaire de définir à propos de quoi seront vos photos pour donner une meilleure fondation à votre projet.
Alors, pour commencer, faites une liste de ce qui vous intéresse ; des choses que vous avez toujours appréciées, qui vous font vous sentir mieux, qui vous incitent à aller de l'avant. Vous aimez la nature ? Vous aimez la mer ? Aimez-vous aider les autres ? Un projet peut se définir aussi simplement que ça : “J’aime marcher dans la forêt”. C’est ce principe tout simple qui sous-tend le projet Borealis du photographe Jeroen Toirkens.
Peu importe ce qui vous intéresse, notez-le et répondez à ces questions :
Qu’est-ce que vous aimez faire ?
Qu'est-ce que vous aimez dans cette activité et pourquoi ?
Comment pourriez-vous ne faire que cela ?
Créez un principe narratif
L'étape suivante consiste à examiner la liste que vous venez d’écrire et à découvrir s'il existe un thème récurrent. Quoi qu'il en soit, essayez d'identifier un thème central avec une phrase déclarative courte et précise. Ce sera la prémisse de votre projet. Il peut s'agir d'une citation d'une personne célèbre ou d'une philosophie qui vous a influencé. Bien sûr, avec le temps, cette prémisse pourra évoluer, mais le principe restera la même.
À partir de cette prémisse, explorez les manières dont votre photographie pourrait l’exprimer, choisissez une forme narrative qui permettra de présenter ce projet ou ce principe. Pour développer cette idée, avez-vous besoin d’une série de portraits ? Devez-vous enquêter pour mieux comprendre, réaliser un reportage ? Cette idée est-elle liée à un lieu ? Auquel cas je vous suggérerai toujours de choisir des lieux facilement accessibles, proches de là où vous vivez, pour toujours pouvoir travailler sur votre projet sans le soumettre à un voyage. Tous les genres photographiques sont concernés, ce qui est important est qu’ils soient au service de votre projet, c’est à dire du message que vous avez défini. Vous pouvez bien sûr en combiner plusieurs, chacun s’adaptant aux canaux de diffusion que vous allez choisir.
Il sera également pertinent de mieux connaître les photographes qui ont déjà traité de ce sujet. Existe-t-il des livres photo qui ont été publiés ? Des reportages dans des publications plus ou moins prestigieuses ? Des expositions ont-elles déjà été proposées ? Pour chaque projet que vous trouverez, analysez comment les photos ont été réalisées et demandez vous pourquoi est-ce que le projet fonctionne. Tout le travail que vous proposerez sera une nouvelle pierre à un édifice déjà commencé. Il pourrait être intéressant de choisir un nouvel angle ou un nouveau message sur le sujet choisi, mais parfois vous préférerez vous mettre dans les pas de ceux qui vous ont précédé.
Enfin, choisissez les meilleurs canaux de diffusion de votre projet ou sujet. Chaque canal de diffusion a ses propres règles qui vont impacter l’édition, le choix des photos, la forme narrative la plus appropriée pour diffuser ce projet. Est-ce que vous allez le proposer à un média ou une ONG ? Est-ce que vous en ferez un Zine, voire un livre ? Est-ce que vous créerez un compte instagram uniquement pour ce projet ? Le cas d’Instagram est intéressant, maintenant qu’ils assument ne plus être une application de partage de photo. Il est facile de comprendre que le même projet ne sera pas expérimenté de la même manière dans des publications, des stories, des reels ou sur IGTV. Instagram est devenu tellement tentaculaire que vous devrez adapter la forme narative aux moyens que vous choisirez. Le principe est identique quel que soit le média choisi, vous devrez adapter la forme narrative qui sert le mieux votre projet.
Alignez vos photos sur ce principe narratif
La dernière étape consiste à tracer votre chemin vers votre objectif à commencer à produire les photos qui serviront le ou les principes narratifs choisis. En réalisant les premières photos qui répondent à votre objectif, vous aurez la satisfaction de voir le projet naître et grandir. Vous vous apercevrez également que les photos sont plus faciles à réaliser quand vous définissez une intention, quand elles répondent à un objectif précis.
La réalisation d’un projet personnel est particulièrement enthousiasmante, si vous avez défini une prémisse qui vous procure un grand plaisir.
Le syndrôme de l’étranger
De retour à Paris pendant deux semaines, j’ai eu la chance de pouvoir photographier tous les jours dans ces rues que je connais si bien. Après deux ans sans voir Paris, j’ai posé un regard neuf sur la ville et le quartier où je passais vingt ans.
Dans mes valises, sous les yeux, j’ai pris avec moi l’habitude d’observer plus franchement la lumière. Le soleil de juin à Paris ne pourrait pas passer pour celui de Salvador, mais j’ai pu observer avec plus d’attention comment il transforme la ville. Les gens sont différents, plus nerveux qu’à Bahia et rarement présents dans l’instant. Le rythme est tonique, jusqu’à ce que les terrasses des trottoirs nous arrêtent. Le ton est sec, comme pour se protéger des autres, en quelques heures je vois tout ce qui a changé chez moi.
À dire vrai, j’ai pu expérimenter ce que les expatriés ne connaissent que trop bien : je suis devenu étranger partout. À Salvador je serai toujours le Français, comme photographe on me demandera toujours si je connais Pierre Verger. À Paris, je retrouve les années passées sans me reconnaître dans une identité. Personne n’est Parisien, on le devient.
Le syndrôme de l’étranger est une mentalité que l’on transporte en voyage, que l’on expérimente furtivement en vacances. Il est toujours plus facile de photographier les autres quand on ne vit pas là. Pourquoi ? Parce que mon état d’esprit est différent, parce que j’ai soif de découvrir, de goûter, parce que j’ai faim de garder un souvenir. Parce que j’ai l’excuse de l’étranger, je peux photographier. C’est absurde. Si je ne suis pas capable de photographier dans mon jardin, comment est-ce que je pourrais prétendre sortir de vraies photos ailleurs ?
Il n’est pas plus facile de photographier ici ou là, selon que l’on soit étranger, apatride ou touriste. Il n’est pas possible de photographier en passant, il me faut absolument prendre le temps de la photo. Je veux prendre le temps d’être là, prendre à bras le corps la ville, me poser devant ceux qui y vivent et accepter d’être vu, photographiant.
Je suis Breton, je suis Français, je suis Parisien, mon nom est Italien ou Espagnol. Je suis étranger, je suis de Bahia, mon nom est Personne quand je suis à Paris.
Comment écrire au sujet de vos photos
Comment approchez vous l'écriture dans votre photographie ? Cette question représente probablement l'un des défis les plus compliqués pour les photographes. La réponse la plus fréquente que je reçois à cette question, souvent par un photographe peu ambitieux dans les commentaires d'un réseau social est : "mes photos n'ont pas besoin de légende". La légende n'est en rien obligatoire pour une photo individuelle, mais si vous êtes amené à proposer vos photos au delà d'un cercle restreint et avez quelque aspiration artistique, vous allez avoir besoin de parler de votre travail et d'écrire au sujet de vos photos ou des projets que vous menez.
Les différentes manières de lire une photo ou de la légender font partie des plus longues sections de mon programme L'Étincelle, et si ce ne sont pas les modules les moins vus, ce sont les moins commentés. S'il peut paraître difficile de parler d'écriture au sujet de la photographie sans prendre appui sur des exemples, je vais tout de même essayer d'établir quelques principes. Dernière précaution, tout au long de ma vie de photographe, j'ai été coupable de tous les défauts que je décris ici.
Comment écrire au sujet de ses photos ? Pour commencer, vous devrez être capable de regarder longuement et attentivement des images, de les lire et de comprendre comment se transmet le message. Je vous recommande de commencer à écrire au sujet d'un projet ou de photos avant que tout ne soit terminé. Le procédé de conceptualisation du projet, sa définition et son angle sont tout aussi importants que les considérations techniques de sa production.
Un projet photo pourra toujours émerger de photos déjà réalisées, pourtant je vous conseille de mêler en permanence photographie et écriture. Évitez d'écrire après avoir fait des images, si vous le pouvez commencer à écrire avant même de commencer à photographier. Au moins, menez les deux activités de front, vos photographies bénéficieront de vos temps de réflexion et d'écriture.
De la même manière que certaines photos ne fonctionnent pas aussi bien que d'autres, certains textes seront trop compliqués, d'autres seront hors sujet. Si vous commencez à peine à écrire, souvenez-vous de vos premières photos et constatez que vos premiers textes ne seront pas les meilleurs.
Si ce que vous écrivez ne figure pas effectivement dans vos images, vous avez un problème. Le plus gros frein à la progression en photographie, que je vois chez les personnes qui participent à mes formations, est la confusion entre le moment qu'ils ou elles ont vécu au moment de la photo et ce qu'ils perçoivent de l'image. L'analyse d'une photo pour ce qu'elle est, pour ce qu'elle dit, au delà de ses caractéristiques purement esthétiques, est la plus importante compétence à travailler.
Vous pouvez classiquement avoir trois types de titres, légendes ou textes qui accompagennt une photo :
Texte descriptif, qui répond aux questions : Quoi ? Qui ? Quand ? Où ?
Texte narratif, qui raconte se qui se passe dans la photo.
Texte complémentaire, qui ajoute du sens à la photographie.
Tout comme les images déjà existantes vont aider à comprendre celles qui suivent dans un projet, elles doivent également informer votre écriture. Les projets évoluent souvent de manière imprévisible. Soyez ouvert aux possibilités que vous offrent un texte. Un texte qui ne parle pas de ce que contiennent vos photos est en réalité une indication sur la direction que peut prendre votre travail. Et c'est ainsi que vous pouvez trouver souvent de meilleures photos.
Réévaluez constamment ce que vous avez, à la fois en terme d'images et de textes. Le projet et son écriture peuvent évoluer ensemble, se nourrir l'un de l'autre.
Les photographes ne sont pas toujours de bons éditeurs. Assembler des photos pour leur donner du sens est un talent, je crois surtout que c'est une discipline qui se travaille tout autant. Si la démarche d'édition et de séquençage est très intuitive, l'écriture doit vous aider à mieux comprendre comment fonctionne une série de photos. Être exigeant et honnête avec soi-même est très, très difficile, même si l'on a les meilleures intentions. C'est vrai sur la lecture d'une photo, comme sur la compréhension d'une série de photos. Développer un sens profond du travail photographique à travers l'écriture va vous faire progresser. Si vous savez écrire sur votre travail et sur vos photos, selon toute vraisemblance, vous serez également en mesure d'assembler une bonne séquence de photos.
Ceci étant, n’écrivez pas seulement des textes descriptifs de vos images, ne décrivez pas vos photographies. Vous devez savoir que vos spectateurs ne sont pas aveugles. Sachez également que, selon toute vraisemblance, ils ne sont pas stupides. N'expliquez pas vos photographies. Vos textes doivent permettre de comprendre pourquoi est-ce que vous photographiez, pourquoi vous photographiez ces sujets, pourquoi vous utilisez ce medium et pas un autre, pourquoi votre message est important pour la société. Pourquoi.
Personne ne s'attend à ce que vous essayiez d'impressionner les gens en embellissant un texte avec du jargon ou des tournures alambiquées. Pour moi, le meilleur moyen de commencer à écrire est d'effectivement écrire à votre meilleur(e) ami(e) en expliquant ce que vous souhaitez faire et montrer. Quel est le message de vos photos ? Sans surprise, lire beaucoup doit également vous aider à écrire. Observez comment les photographes que vous avez pris pour modèle parlent de leurs photos ou de leur travail.
Employez des mots simples, de votre langage courant, vos textes doivent d'abord avoir votre voix. Le message qui est véhiculé dans vos photos doit se retrouver dans vos textes. Vous devez donc être conscient de la qualité de vos photos, du message qu'elles portent et de comment elles y arrivent.
Je n'ai malheureusement pas de bonne nouvelle à ce sujet, cela va demander du travail. Vos premiers textes ne seront pas les meilleurs, vous allez avoir besoin de vous entraîner, beaucoup. Répétez l'exercice encore et encore, sur chaque projet, sur chaque série de photos qui a du sens pour vous. Et vous arriverez à en donner pour tous ceux qui voient vos photos.
Comment Zora Murff travaille sur un livre photo
Je souhaite partager plus de travaux de photographes contemporains, qui travaillent encore, plutôt que des grands-maîtres déjà passés à la postérité. Je vous propose donc de découvrir aujourd'hui le travail de Zora Murff en nous intéressant à la manière qu'il a de mener un projet photographique. Ce que j'appelle ici la réalisation d'un projet prend le plus souvent la forme d'un livre. Le livre photo est pour moi le meilleur véhicule pour la photographie, quelque soit le genre photographique ou les sujets traités. Si vous voulez constituer un livre intéressant ou cohérent, cela demandera une telle somme de travail qu'il prendra d'abord la forme d'un projet photographique pour son auteur.
L'une des meilleures ressources que j'ai pu trouver sur la réalisation de projets photographiques est le livre Photowork de la fondation Aperture, et je vous propose d'en extraire ici quelques enseignements du travail de Zora Murff qui y est présenté. Photowork contient en tout des interviews de 40 photographes et si vous voulez progresser dans votre démarche photographique, et lisez l'Anglais, je ne saurais trop vous le recommander.
L'idée du projet vient en premier
Pour moi l'idée vient en premier, avant de commencer à prendre des photos. Je ne suis pas très prolifique et je lis beaucoup, je recherche et réfléchis avant de m'embarquer dans un nouveau projet. Les idées sont éparpillées entre mes blocs, des bouts de papier, et mon téléphone. Quand je me sens prêt à recommencer à produire des images, je consulte ces idées et soit je les recrée, soit je garde mes yeux ouverts quand je photographie.
Zora Murff
Je trouve intéressant d'observer comment travaillent d'autres photographes, spécialement quand la pratique est radicalement différente. Personnellement les idées viennent en produisant des photos, par la déambulation, la sérendipité des rencontres ou une impression sur l'esprit du lieu. La lecture, les recherches et l'expérimentation viennent après avoir trouvé une idée.
Zora Murff procède lui d'abord par des lectures et des recherches et je trouve important de rappeler à quel point cette partie est importante dans le travail photographique. Quand je dois travailler ou écrire sur une nouvelle destination, je lis autant que je peux sur le lieu : des articles d'actualités, de la fiction par des auteurs étrangers ou des documentaires produits localement. Toute cette recherche vient nourrir une réflexion, et même si je trouve mes idées en photographiant, je dois me rappeler à quel point la photographie est influencée par mes connaissances et recherches sur un sujet.
Un projet photo est une introspection
Quand j'étudiais la psychologie, le premier jour d'un cours sur la méthode de consultation, le professeur nous a dit : "Avant de pouvoir aider qui que ce soit avec ses problèmes, il faut d'abord régler les vôtres". Mon approche dans la réalisation d'un projet est d'abord introspective, puis je me tourne vers l'extérieur. Mes projets commencent avec une série de questions, j'utilise la photographie comme un moyen de travailler sur ces réponses. Quand je sens que j'ai commencé à gérer mon enjeu personnel dans ce travail, je commence à faire ces connections externes.
Récemment, j'ai beaucoup pensé à certaines contradictions dans mon travail. J'écoutais un podcast qui expliquait comment le racisme scientifique est inclut dans les politiques migratoires. La rhétorique libérale est souvent utilisée pour déprécier la xénophobie. Mais pour travailler à la réconciliation, il faut bien se regarder dans le miroir pour devenir responsable de notre passé. Des mouvements comme Black Lives Matter ou Me Too ne sont pas nés d'un aveuglement à l'auto-critique. Ce qui arrive autour de vous a une grande influence sur ce que vous désirez produire.Zora Murff
Un livre photo en dit tout autant sur le sujet que sur son auteur. Je crois que la photographie est essentiellement une démarche introspective. La photographie est un langage rapide, presque instantané, mais les émotions auxquelles il fait appel sont tout aussi intenses. Je crois également que les sujets que l'on choisit de montrer sont importants, la photographie a une conséquence et porte un message social. Si je décide de photographier des phares avec un trépied, je suis malgré moi porteur d'un message sur le tourisme moderne. Le travail de Zora Murff me force à voir qu'il n'y a pas de photographie anodine. Le message d'un projet projet photo est tout aussi important que son contenu.
Le projet est-il plus important que les photos individuelles ?
Oui et non. Un projet photo est un véhicule intéressant, et je pressens que la photographie est sur le point de s'y résoudre. Je pense aussi que la croissance rapide de publication de livres photo - à la fois comme véhicule pour un projet et comme accomplissement personnel- engendre le sentiment que ce serait une règle en photographie. Mais je suis intéressé par ce que pourrait être la prochaine manière de présenter son travail.
À propos de la production de photos individuelles, je suppose que ça dépend de comment la personne travaille. Pour moi, J'évalue les images individuellement pour tout le temps repousser les limites du travail que je produis, que je sois dans la réalisation d'un projet ou dans la production d'une photo juste parce que.Zora Murff
Certaines photos du dernier livre de Zora Murff, 'At No Point in Between' (2019, malheureusement épuisé), peuvent paraître moins fortes. Un plan aérien en noir et blanc d'une zone pavillonnaire en bordure d'autoroute, des photographies de coupures de journaux, et beaucoup d'autres clichés à priori étonnants. Ces photos prennent tout leur sens uniquement dans le cadre du projet en question, de l'histoire qui est racontée. Je pense notamment au fabuleux domino visuel entre ces policiers américains qui prêtent serment et un immeuble abandonné avec la signalisation qui y répond.
Cependant la recherche de photos exceptionnelles est pour moi le quotidien d'un photographe, que ce soit dans l'analyse des photos, l'édition ou la constitution d'un projet photo. Chercher en permanence à améliorer des photos individuelles est ce que je trouve de plus intéressant. Mais parfois, on ne peut pas utiliser des photos exceptionnelles sans également raconter avec du contexte ou des détails qui mettent en valeur l'histoire.
Trouver sa voix
Si je souhaite que ma voix soit différente ? Tout le temps. Il y a tellement de travaux forts et qui ont du sens, beaucoup d'artistes que j'admire. Mais ma voix sera toujours ma voix. Je crois que c'est une autre manière de grandir comme artiste - ne pas copier le travail des autres - mais de trouver l'inspiration et de l'utiliser comme un outil pour se mettre un défi de produire quelque chose de nouveau et d'étonnant.
Zora Murff
Trouver sa voix unique en photographie est une recherche qui relève effectivement de l'inspiration d'autres photographes et de l'intérêt que l'on trouve à certaines photographies ou à des styles particulier. Il m'apparaît pourtant presque impossible de définir pour soi un style avant de commencer à photographier. Il me semble que le style est un commentaire a posteriori.
De la même manière, je n'imagine pas qu'il soit possible de vraiment copier le travail d'autres photographes, en tout cas dans le genre qui m'occupe le plus,
en photographie de rue. On peut analyser et éventuellement imiter une manière de produire des photos, et c'est même je crois recommandé pour trouver ce que l'on aime produire comme photos et où sa photographie se situe par rapport aux anciens, mais la copie est à proscrire.
Comment savoir qu'un projet est fini
Mes deux derniers livres Corrections (publié en 2015) et At no Point in Between (2019) ont été fabriqué en presque trois ans, y compris le temps consacré à la recherche. Cependant, chacun de ces livres étaient rattachés à mes études, donc il n'y avait pas vraiment de date limite.
Zora Murff
Voilà une question qui n'apporte pas de réponse simple : au bout de combien de temps ou de photos est-ce qu'un projet atteint son terme ? J'ai le sentiment qu'un projet ne se termine jamais vraiment, en tout cas pour moi je ressens que je suis plutôt celui qui s'est épuisé intellectuellement. Je crois que certains projets que je n'ai pas poursuivi ont pris fin d'eux mêmes, d'abord parce que je ne croyais plus avoir quelque chose à dire.
Les deux projets principaux sur lesquels je travaille actuellement sont en cours depuis déjà deux ans. J'espère pouvoir en sortir un d'ici la fin de l'année, mais je sais déjà que le second a probablement besoin d'une bonne année supplémentaire.
Pour continuer à suivre le travail de Zora Murff, suivez-le sur Instagram ou explorez son site.
Combien de bonnes photos sur une journée de photographie de rue ?
https://www.facebook.com/genaro.bardy.photographer/videos/353961449121316/
Photographie de rue à la première personne - Salvador de Bahia, Pelourinho
Combien de bonnes photos obtenez-vous en une journée de photographie de rue ? Cela va dépendre de la manière dont vous allez définir ce qu'est une bonne photo.
En ce qui me concerne, si je reviens d'une sortie en photographie de rue avec une seule bonne photo pour un projet, je m'estime heureux. Également, sur un voyage photo je suis heureux si j'ai une bonne photo par jour. Bien sûr, je ne parle pas de photos "convenables', dont je pourrais me servir pour un client.
Si je photographie pour un client, je produirai et enverrai beaucoup plus de photos acceptables, qui fonctionnent. Je serais un photographe très cher si je n'étais capable de livrer qu'une seule photo par jour à un client. Alors, comment j'arrive à ce ratio d'une bonne photo pour une journée de prise de vues ?
Je vois 3 différents niveaux de qualité en photographie :
Les photos qu'un magazine pourrait acheter. Ce sont des images professionnelles qui racontent parfaitement l'histoire d'un client. Ces images sont parfaites à bien des égards, elles servent simplement l'histoire d'un autre, que ce soit un client ou d'un média. C'est l'étalon basique pour analyser ses photos : demandez-vous "est-ce que je pourrais voir cette photo dans un magazine ?". Si la réponse est non, c'est que vous avez encore du travail.
Des images qui pourraient être dans un livre ou une exposition. Ce sont vos meilleurs travaux, les 10-15 images parfaitement conçues et qui fonctionnent entre elles. Ce sont les photos qui tiennent au mur et qui ensemble racontent une histoire ou un projet. Ce genre de photos, je suis content si j'en ai une par jour.
Le troisième et dernier niveau, ce sont les photos qui ont leur place dans un musée. Je ne pense pas que vous puissiez décider d'en produire. Ce sont des images avec une vie qui leur est propre, ce sont les autres qui vous demandent de les voir. La plupart d'entre nous n'en produirons probablement jamais, en tout cas ça ne me préoccupe pas plus que ça puisque je ne décide rien ici.
Alors quand je travaille sur livre photo, ce qui est le cas dans le petit film que vous pouvez voir plus haut, je vise le 2ème niveau. Les photos sur lesquelles je peux revenir avec plaisir, celles que je peux accrocher sur un mur. Si je ne suis pas à ce niveau là, je ne considère pas les photos pour mon livre.
Cette vidéo est tournée au Pelourinho, la vieille ville de Salvador de Bahia, où j'habite. J'y suis allé pour prendre des photos d'innombrables fois, c'est mon endroit par défaut où je traîne pour prendre des photos de rue. Et j'ai la chance d'avoir obtenu ce jour-là une photo parfaite pour mon projet, pour le livre sur lequel je travaille.
Photo Genaro Bardy
My Soul so Cool from the Bath of Light - Salvador de Bahia, Pelourinho - Sept 2020
Pour aller plus loin :
Esperando Luna
Les derniers mois de grossesse pour un deuxième enfant peuvent paraître longs. Nous savons déjà comment l'histoire va se dérouler et nous attendons son dénouement.
Ces derniers mois d'attente furent particuliers pour notre famille : exclusivement à la maison, confinés pendant trois mois en attendant qu'une pandémie passe. Les jours sont intenses, Tom grandit en courant, la cuisine, le salon, la ville dans une torpeur de fin d'été.
Ensuite, l'isolation quand le virus se déclare. Pour chacun de nous, la solitude et l'attente dans une chambre pendant 15 jours, alors que la vie continue à quelques mètres derrière une porte.
Et puis, un jour de juin où les virus et les autres n'ont plus d'importance, elle arrive.
Luna
Os últimos meses de gravidez de um segundo filho podem parecer longos. Já sabemos como a história se desenrolará e aguardamos o resultado.
Esses últimos meses de espera foram especiais para a nossa família: em casa, por três meses, enquanto esperávamos uma pandemia. Os dias são intensos, Tom cresce correndo, a cozinha, a sala, a cidade em um torpor de fim de verão.
Finalmente, isolamento quando o vírus eclode. Para cada um, a solidão e a espera no quarto por 15 dias, enquanto a vida continua alguns metros atrás de uma porta.
E então, um dia de junho, quando vírus e outros não importam mais, ela chega.
Luna