5 leçons de photographie avec Bieke Depoorter

Originaire de Courtrai, en Belgique, Bieke Depoorter est née en 1986. La photographe a obtenu un master en photographie à l'Académie royale des beaux-arts de Gand en 2009. À 25 ans, elle a été nommée pour rejoindre L’agence Magnum, dont elle est devenue membre à part entière en 2016.

Ses premières photographies sont le résultat d'une approche unique : elle rencontre des gens par hasard et arrive à photographier dans leurs maisons et à capter leur intimité. Bieke Depoorter capture des moments indescriptibles, fragiles et intenses.

1- Proximité et authenticité

« Tout le monde sait que je pars le lendemain matin, donc nous n’avons que quelques heures ensemble. Il est plus facile de partager des secrets avec un étranger - quelqu’un que vous savez que vous ne reverrez jamais - qu’avec un ami proche que vous voyez tous les jours. Pour moi, la nuit et les gens dans leur maison ont quelque chose de spécial. Quand il fait sombre, l’atmosphère change. Les gens sont plus réels, d’une certaine manière. Dans la rue, on fait semblant d’être quelqu’un d’autre. Je le fais moi-même. Mais quand vous rentrez chez vous, le masque tombe. »
— Bieke Depoorter

Le secret de Bieke Depoorter : l’authenticité. Comment y arriver ? La proximité, l’intimité avec ses sujets… Bieke nous montre que s’immiscer dans le quotidien des gens permet de révéler qui ils sont vraiment. Chez soi, on ne porte plus de masques, il n’y a plus de prétentions, de paraître, nous pouvons être qui nous sommes réellement.

C’est probablement une démarche qui peut faire le plus peur pour des photographes, mais tout comme je vous conseillerai en photographie de rue de commencer à aller parler à des inconnus si vous voulez progresser, si vous êtes intéressés par la photographie documentaire, commencez par frapper à la porte de vos voisins et proposez leur une séance de photos chez eux ou un reportage dans leur activité professionnelle. Vous serez surpris de la facilité avec laquelle les gens acceptent.

C’est exactement la démarche que j’ai proposé à Élodie Sauvage Pieri dans mon groupe de Mentorat l’année dernière, alors que la France était sous couvre-feu, et le résultat fut remarquable.

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

2- Gagner la confiance de ses sujets

« Je voulais essayer de trouver la confiance dans un endroit où il n’y a pas de confiance. J’avais vraiment l’impression que les gens protégeaient leur vie privée. Ils sont amicaux dans la rue, mais ils ne vous inviteraient pas chez eux. Nous voyagions ensemble dans de petites villes et marchions toute la journée jusqu’à ce que nous trouvions quelqu’un qui nous fasse confiance et à qui nous faisions confiance. Puis, une fois que nous étions d’accord pour que je passe la nuit sur place, elle me laissait tranquille. »
— Bieke Depoorter

Toute photographie en dit autant sur le ou la photographe que sur le sujet qui est montré. En portrait, le résultat est la conséquence directe de la relation que vous allez établir avec les personnes que vous rencontrerez. Dans la grande majorité des cas, vous ne connaîtrez pas les personnes avant de commencer à les photographier.

Personnellement, pour établir la confiance, je demande simplement quelle est l’histoire de la personne, qu’est-ce qui l’a amené ici ou là, et je suis très attentif à la réponse. Je crois que la confiance se gagne par la preuve, en étant sincèrement intéressé par la personne et curieux de qui elle est. Pour bien voir, il faut parfois savoir écouter.

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

3- La réalité est plus lumineuse une fois la nuit tombée

« - Quel est votre rapport à la nuit ?

“Je pense que c’est le moment de la journée où on fait ressortir sa véritable identité́. Moi y compris. Je vois le monde différemment quand le soleil est couché. D’ailleurs, je ne prends presque plus de photos le jour.”

- C’est contradictoire avec l’étymologie du mot “photographier” : “écrire avec la lumière”.

“C’est vrai. Mais pour moi la réalité est plus lumineuse une fois la nuit tombée. »
— Bieke Depoorter

Rien ne remplace la nuit, d’abord pour tout ce qu’elle contient de symbolique, il va sans dire que c’est la nuit qui révèle notre part d’ombre. La lumière ne serait rien sans l’ombre qu’elle crée, de la même manière la nuit sublime toutes les sources de lumière et montre la face cachée de l’humanité. Ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle le “monde de la nuit”.

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

4- Photographier ses émotions

« - Des influences et des inspirations ?

“Ce qui est bien est que mes parents n’aiment pas l’art et que, jusqu’à l’âge de 18 ans, je n’ai jamais visité de musée. Je n’avais donc pas d’idées préconçues avant de commencer à prendre des photos. Je photographie simplement comme je le sens. Cela peut paraître cliché, mais ce sont les petites choses de la vie qui continuent de m’inspirer. »
— Bieke Depoorter

Voici le meilleur conseil : écouter ses envies, ses émotions. Cela permet d’affirmer son style et de faire ressortir sa personnalité. La vie doit vous inspirer, autant que les grands maîtres de la photographie. L’inspiration vient d’abord de vous-même, car la photographie est une pratique essentiellement intuitive.

(Même si je vous conseillerai toujours de connaître l’histoire de la photographie et ceux qui sont passés avant vous ;) )

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

5- Considérer les gens comme des acteurs et non des sujets

« Le projet en Égypte en 2011 m’a transformé. Le fait de photographier, moi l’Européenne, ce peuple en pleine révolution m’a fait prendre conscience du regard que je pose et qui est forcément biaisé parce que c’est le mien. Ensuite, à Sète et avec le court-métrage que j’ai réalisé́ en Norvège en 2015, j’ai fini par accepter de considérer les gens que je prenais en photo comme des acteurs, et pas comme des sujets. »
— Bieke Depoorter

Depuis quelques années, je parle toujours des personnes dans mes photographies comme étant des personnages. Quel est le langage du corps ? Qu’est-ce qu’ils ont l’air de faire ou de penser ? Même si ce n’est pas conforme à la réalité de ce que je connais du sujet ou de la scène, la seule chose qui importe est ce que montre la photo et ce que ressent le spectateur en étant mis face à ce personnage.

Prendre chaque sujet comme un personnage ouvre également des possibilités infinies dans les techniques narratives pour construire une série de photographies ou un projet.

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

Photo © Bieke Depoorter

Genaro Bardy

Photographer & Writer

and now I guess… Youtuber

Dad of two, husband of the One

https://instagram.com/genarobardy
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